La cicatrisation est un processus physiologique complexe destiné à protéger et réparer l’organisme. Pour faire le point sur les avancées réalisées dans le domaine des soins de plaies une journée a été organisée au CHU de la Réunion. Retour sur les principales interventions des experts…
Bonnes et mauvaises pratiques en plaies et cicatrisation en dermatologie, le Dr Sophie Osdoit (dermatologue) a partagé son expertise. Devant un ulcère de jambe, la démarche diagnostique doit être rigoureuse et reposer sur un interrogatoire et un examen clinique complet. Les causes vasculaires sont les plus fréquentes : ulcère veineux, artériel ou mixte, angiodermite nécrotique. Les soins locaux doivent être adaptés au type d’ulcère et au stade de cicatrisation : pas de détersion d’un ulcère artériel, pas d’utilisation d’antiseptiques ou d‘antibiotiques locaux, insister sur le port de la contention veineuse dans les ulcères veineux. Une bonne connaissance des types de pansements est nécessaire. La prise en charge des escarres repose avant tout sur une mise en décharge et une évaluation multidisciplinaire des plaies sacrées. Un contact osseux doit être recherché systématiquement devant une escarre stade 4. Les ulcérations de causes rares doivent être évoquées devant un terrain, un aspect, ou une localisation atypique d’ulcères. Les causes sont variées : vascularites (chercher un purpura), connectivites, hémopathies, pyoderma gangrenosum, calciphylaxie, causes iatrogènes, plaies cancéreuses… Il faut savoir les évoquer pour éviter les erreurs de prise en charge.
Les cicatrices et des plaies chez l’enfant ont été abordées par Dr Fernanda Frade (chirurgie pédiatrique). L’évolution des cicatrices chez les enfants est variable selon l’âge. L’absence de comorbidité favorise le plus souvent des conditions optimales de cicatrisation. La cicatrisation embryonnaire permet une cicatrisation sans cicatrice grâce à l’absence de phase inflammatoire. L’hypertrophie reste fréquente à partir de 2 ans et jusqu’à l’adolescence. Certaines complications spécifiques doivent être prévenues au moment de la prise en charge initiale comme les brides ou les cicatrices alopéciques. Enfin, un suivi est nécessaire tout au long de la croissance. La prévention occupe une place essentielle avec l’utilisation des traitements complémentaires disponibles et ce, dès le début du traitement (cicatrisation en position d’extension maximale, orthèse de posture, massage, compression, hydratation, protection solaire, thermalisme…).
Dr Sarah Bekkar (chirurgie digestive) a détaillé la prise en charge chirurgicale des escarres. La chirurgie des escarres associe excision et couverture par lambeau, le plus souvent en un seul temps opératoire. Les différents lambeaux utilisés sont classiques pour les cas simples. Les soins péri-opératoires sont primordiaux : la gestion de la bactériologie et des antibiotiques, la gestion des supports, l’absence de station assise pendant les 45 jours postopératoires. Malheureusement, cette chirurgie est ingrate, difficile, peu valorisante et donc pratiquement plus enseignée – elle connaît un véritable marasme. Or cette chirurgie complexe demande une connaissance des techniques de chirurgie plastique, des techniques de résection osseuse et des notions précises de bactériologie. Elle ne peut se pratiquer en dehors d’unité spécialisée multidisciplinaire et le CHU de la Réunion a la chance de disposer d’une telle structure.
Dr Farouk Dargai (chirurgie orthopédique et traumatologique) a abordé la spécificité d’un SOS Main sur l’île de la Réunion et prise en charge des lésions graves des membres par attaques de requin. Il y a en France 1.500.000 cas/an de lésions de la main dont 620.000 avec un risque important de séquelles. La prise en charge initiale insuffisante de ces lésions peut multiplier par 3 la durée d’arrêt du travail et par 2,7 la durée d’inaptitude, d’où l’intérêt d’une prise en charge dans un centre spécialisé.
La Réunion était un des rares département français (843.617 habitants au recensement 2015) qui n’avait pas de service labellisé SOS main mais ce n’est plus le cas depuis janvier 2018. A la Réunion, il existe essentiellement une industrie agroalimentaire où se concentre 35% de la main d’œuvre (notamment la canne à sucre). Par ailleurs 63 % des produits réalisé par des entreprises locales sont des produits manufacturés. Or, d’une prévention efficace, la Réunion connaît moins d’accidents graves industriels.
On recense sur l’île 40 000 accidents de la vie courante par an et 15 mains soignés par jour. Le jardin réunionnais est une véritable institution qui occasionne aussi beaucoup de blessures de la main. Cela peut aller de blessures par chute d’arbre fruitier, aux lésions par corps étranger végétaux (bambou, bougainvilliers, épine du Christ, palmiste rouge…). Certaines plaies de main sont traitées de façon traditionnelle avec des produits locaux (safran, curcuma…) et ne viennent pas forcement en milieu hospitalier ou alors tardivement. L’île a par ailleurs été confrontée ces dernières années a une recrudescence des attaques de requins. Entre le 1er janvier 2000 et le 30 09 2016, il y a eu 25 attaques de requins occasionnant trois lésions graves du bras, six lésions de l’avant-bras et 4 lésions de la main. Enfin on retrouve aussi beaucoup de lésions de la main occasionnés par des blessures par sabres ou en rapport avec la traumatologie du sport comme les sports de combat. Dans le cadre de la traumatologie routière on retrouve essentiellement des lésions de la main chez les motards (pas de port de gants) mais peu de main ou de coude de portière.
La nutrition joue un rôle primordial dans la cicatrisation. Cet aspect a été abordé par Mme Sabine Rege (infirmière libérale). Le processus de cicatrisation physiologique est destiné à protéger et réparer l’organisme. Il devra pour cela synthétiser différentes cellules immunitaires et de prolifération pour restaurer l’intégrité de la barrière cutanée. Les macro et micronutriments, vitamines et oligo-éléments adéquates pourvoient aux différentes fonctions de synthèse protéique et fournissent l’énergie nécessaire à toutes ces réactions. En cas de dénutrition, ces différentes fonctions seront altérées, ce qui pourrait occasionner des retards de cicatrisation voire un hypercatabolisme qui affaiblirait l’état général du patient car les besoins nutritionnels sont augmentés en cas d’agression. Une nutrition adéquate et des soins locaux adaptés optimisent la cicatrisation des plaies.
Dr Radwan KASSIR (MD,PhD), Chef du service de la chirurgie digestive, CHU de St Denis- La Réunion, Président de la journée des soins de plaies
Concours de l’internat : la Conférence des doyens de médecine défend une réforme “favorable”
Dans un contexte de polémique suscitée par les nouvelles modalités de choix de spécialités pour les internes en médecine, qui dénoncent une forme d’injustice, la Conférence des doyens de médecine a pris la plume. Dans un communiqué publié le 28 août, celle-ci tente de rassurer en affirmant que “l’équité est bien respectée” et que la baisse actuelle du nombre d’internes n’empêchera pas le fonctionnement global de l’hôpital “d’être bien assuré”.