Première campagne de dépistage précoce du cancer de la vessie à partir d’une prise de sang et d’un échantillon d’urines
Les Hôpitaux Universitaires de Strasbourg, les professeurs Pierre OUDET et Didier JACQMIN, ont mis au point un test moléculaire de diagnostic des cancers de l’appareil génito-urinaire à partir d’une prise de sang et d’un échantillon d’urines. Ce test permet de faire le diagnostic du cancer de la vessie même à un stade superficiel de la tumeur.
Le principe de ce test repose sur la mise en évidence des cellules tumorales présentes dans les urines grâce à la détection des altérations génétiques typiques de ces cellules tumorales, en particulier des pertes ou des amplifications de fragments d’ADN (fragments appelés microsatellites).
Un nouveau test indolore et non invasif
A l’heure actuelle, l’examen clinique de référence utilisé à des fins de diagnostic et de suivi est la cystoscopie (méthode endoscopique). L’invasivité et la lourdeur de ce geste empêchent le dépistage dans les populations à risque et incommodent fortement les patients porteurs d’un cancer, qui subissent cet examen tous les 3 à 6 mois.
Le nouveau test, qui utilise la biologie moléculaire, est beaucoup plus confortable pour le patient et permet de détecter un cancer à un stade précoce.
Les différentes étapes de la recherche
La méthode est déjà validée par deux publications et un dépôt de brevet ainsi que la pratique en routine de ce test pour la surveillance des patients suivis par le Service de Chirurgie Urologique (Protocole Hospitalier de Recherche Clinique 1997). Plus de 1000 patients atteints de cancer de la vessie ont pu bénéficier de ce test.
L’utilisation de ce test a permis d’atteindre une sensibilité de 85% par la détection des microsatellites dans les urines. Si cette sensibilité est comparée à un autre test non invasif, à savoir la cytologie urinaire (sensibilité de 35%), le bénéfice apporté par la nouvelle méthode est considérable.
Etant donné que les chances de guérison sont d’autant plus grandes qu’une tumeur est détectée précocement, il serait tout à fait bénéfique en matière de santé publique de pratiquer des dépistages systématiques dans les populations présentant un risque accru de cancer de la vessie. La prochaine étape est donc d’évaluer le test des microsatellites pour la détection d’éventuelles tumeurs chez des personnes à risques mais ne présentant pas encore de symptômes.
Les questions qui seront étudiées dans ce protocole de dépistage concernent l’étude de la sensibilité du test (est-il capable de détecter des tumeurs à un stade très précoce ?) et le rapport coût / bénéfice clinique lorsqu’un tel test est appliqué à une population non malade.
Ouverture d’une consultation de dépistage précoce du cancer de la vessie sous protocole de recherche bio-médicale et première campagne de dépistage
Une campagne d’inclusion de personnes à risque (homme, femme de plus de 50 ans, fumeurs et/ou exposés dans une première phase) a ouvert ses portes à la fondation transplantation de l’Hôpital de Hautepierre, dans le cadre d’une recherche bio-médicale visant à recruter environ 2000 personnes.
La durée de l’étude se fera sur 18 mois.
Cette étude permettra d’évaluer le bénéfice potentiel du test d’un point de vue médical et l’incidence économique de son utilisation en tant qu’outil de dépistage..
Ce projet a été reconnu par la Commission Scientifique de la Recherche Clinique et a reçu l’avis favorable du Comité Consultatif de Protection des Personnes en Recherche Biomédicale (CCPPRB).
Avant le début de l’étude, des réunions d’information ont été organisées à l’intention des médecins généralistes, grâce auxquels il sera possible de recruter des personnes présentant des risques significatifs de développer un cancer de la vessie. Au cours de ces réunions, une notice concernant le protocole ainsi que les informations destinées aux personnes pouvant être incluses dans l’étude ont été diffusées. La mission du médecin généraliste consiste à proposer aux personnes qui présentent les critères d’inclusion mentionnés ci-dessus de participer à une campagne de dépistage.
Des campagnes d’information seront également organisées avec l’aide des caisses primaires d’assurance maladie et des mutuelles.
Toute personne souhaitant se porter volontaire pour cette étude peut téléphoner au numéro vert 0.800.58.30.32
Ce programme de dépistage, qui représente un investissement de 450 000 euros, a pu voir le jour grâce à des financements des Hôpitaux Universitaires de Strasbourg, de la Communauté Urbaine de Strasbourg, du Conseil Général du Bas-Rhin et de la Région Alsace.
L’APS (Assureurs Prévention Santé), la Ligue contre le cancer du Bas-Rhin et du Haut-Rhin ont également apporté leur contribution au projet à la fois dans sa partie initiale et dans son développement.
Les étapes du test
La procédure du test moléculaire des microsatellites pour la détection des cellules tumorales à partir des urines comprend les étapes suivantes :
– la purification des cellules du culot urinaire
– Les urines sont centrifugées afin d’en réduire le volume.
L’urine étant un fluide biologique complexe et hétérogène, une étape de purification des cellules présentes est nécessaire. L’extraction de l’ADN des cellules des culots urinaires et des leucocytes du sang est automatisée. L’extraction de l’ADN des leucocytes est effectuée à l’aide d’un robot de pipetage et d’un appareil d’amplification par PCR. A noter que 16 à 96 échantillons sont mesurés simultanément.
Le cancer de la vessie en France
Le pronostic du cancer de la vessie, quatrième cancer chez l’homme, repose largement sur la précocité du diagnostic et la qualité du suivi des patients après leur traitement initial.
Le cancer de la vessie, s’il est détecté à un stade précoce, permet à 75% des patients atteints de guérir sans rechute.
Les facteurs de risque et de récidive étant clairement identifiés, le dépistage et le suivi chez des individus présentant ces risques sont primordiaux.