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Cancer bronchique : un meilleur taux de survie grâce au typage moléculaire

L’étude observationnelle BIOMARQUEURS France vient de démontrer l’intérêt du typage moléculaire de la tumeur dans l’amélioration de la survie globale des patients traités pour un cancer bronchique. L’analyse des anomalies moléculaires permet une individuation des stratégies thérapeutiques. Plus ciblés, les traitements de 1ère et 2ème lignes obtiennent de meilleurs taux de réponse.

L’étude observationnelle BIOMARQUEURS France vient de démontrer l’intérêt du typage moléculaire de la tumeur dans l’amélioration de la survie globale des patients traités pour un cancer bronchique. L’analyse des anomalies moléculaires permet une individuation des stratégies thérapeutiques. Plus ciblés, les traitements de 1ère et 2ème lignes obtiennent de meilleurs taux de réponse.
Cette étude était exceptionnelle à double titre, tant par  l’importance de la cohorte : 17 664 patients que par l’organisation nationale déployée au travers 28 plateformes hospitalières de génétique moléculaire. Deux services de l’AP-HM ont participé à cette étude, le service d’Oncologie multidisciplinaire et innovations thérapeutiques dirigé par le Pr Fabrice Barlesi et le Service de Transfert d’Oncologie Biologique sous la responsabilité du Pr L’Houcine Ouafik.  Les résultats de ces travaux ont fait l’objet d’une publication dans la prestigieuse revue The Lancet.
Résultats de l’étude Biomarqueurs-France
L’étude Biomarqueurs-France a concerné tous les patients porteurs d’un CBNPC pour lesquels un test moléculaire a été effectué en routine par l’une des 28 plateformes de génétique moléculaire, entre avril 2012 et avril 2013. Au final, 17 664 patients ont été inclus dans cette étude. Tous les patients ont bénéficié d’un typage moléculaire de leur tumeur à la recherche d’une mutation activatrice de l’EGFR (récepteur du facteur de croissance épidermique), susceptible d’être traitée par deux inhibiteurs spécifiques ayant reçu l’Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) pour cette indication. Les tumeurs de ces patients ont aussi fait l’objet de recherche de biomarqueurs émergents tels que les mutations des gènes KRAS, BRAF, HER2 et PI3KCA ainsi que le réarrangement du gène ALK (qui en cas de positivité donne accès à un inhibiteur spécifique ayant l’AMM).
Le premier objectif de l’étude Biomarqueurs-France était de faire une analyse descriptive de la prévalence, à l’échelle de la France, de ces 6 anomalies moléculaires et des caractéristiques cliniques associées à ces anomalies.
Cette étude avait pour objectifs seconds d’analyser les corrélations entre les anomalies moléculaires détectées et la décision thérapeutique (individualisation réelle du traitement) ainsi qu’entre les anomalies moléculaires et les données de survie sans progression et de survie globale.

Le délai médian entre la réalisation du test moléculaire et l’obtention du résultat écrit était de 11 jours. Une anomalie moléculaire a été détectée dans la tumeur de 50% des patients (1). La présence d’une anomalie moléculaire a eu un impact sur le traitement de première ligne pour 51% des patients. Elle est associée à une amélioration significative en termes de taux de réponse au traitement de première ligne (37% vs 33% ; p=0·03) et au traitement de deuxième ligne (17% vs 9% ; p<0·0001).
La présence d’une anomalie moléculaire est aussi associée à une amélioration de la survie sans progression en première ligne (10·0 mois vs 7·1 mois ; p<0·0001) et de la survie globale (16·5 mois vs 11·8 mois ; p<0·0001).
Cette étude d’une ampleur inégalée a été rendue possible par l’organisation du système français construit autour de 28 plateformes de génétique moléculaire qui donnent un accès à ce typage pour tous les patients atteints de cancer. En effet, en France, tous les patients du territoire peuvent bénéficier de ces tests gratuitement quel que soit leur lieu de prise en charge.
Ces résultats, qui viennent d’être publiés dans la prestigieuse revue médicale The LANCET, confirment l’intérêt d’un typage moléculaire de l’ensemble des malades métastatiques atteints de cancer bronchique non à petites cellules (CBNPC) et l’intérêt d’un dispositif national facile d’accès organisé autour des 28 plateformes de génétique moléculaire.

Les plateformes de génétique moléculaire
L’individualisation des stratégies thérapeutiques constitue une évolution majeure de la prise en charge des patients présentant un cancer. Néanmoins, passer de l’échelle de la recherche, à l’application clinique pour l’ensemble des patients qui en ont besoin, suppose une organisation nationale du typage moléculaire des tumeurs.

L’Institut National du Cancer (INCa) soutient depuis 2006 un programme de structuration de 28 plateformes hospitalières de génétique moléculaire afin qu’elles recherchent en routine un panel de biomarqueurs déterminant la prescription des thérapies ciblées (disponibles ou à venir). Leur activité permet ainsi de proposer des stratégies thérapeutiques adaptées à chaque patient, donc plus efficaces.
Ces tests moléculaires sont financés à la fois par l’INCa et le Ministère chargé de la Santé. L’étude Biomarqueurs-France pilotée par l’Intergroupe Francophone de Cancérologie Thoracique (IFCT) a été réalisée grâce aux représentants de ces plateformes de génétique moléculaire, à plus de 3000 cliniciens impliqués dans la prise en charge des malades atteints de cancer du poumon et au soutien financier de l’INCa et de la DGOS.

Les cancers bronchiques non à petites cellules (CBNPC)
Les cancers bronchiques représentent la première cause de décès par cancer en France. Les cancers bronchiques non à petites cellules (CBNPC) représentent environ 85 % de l’ensemble des cancers bronchiques (2). Depuis 2005, la découverte des mutations activatrices de l’EGFR et du réarrangement du gène ALK a accéléré les projets et les progrès dans la connaissance et la prise en charge des malades présentant un cancer bronchique, avec, en moins de 5 ans, une première autorisation de mise sur le marché (AMM) conditionnée à la mise en évidence d’une anomalie biologique et des résultats thérapeutiques deux à trois fois supérieurs (taux de réponse, médiane de survie sans progression, médiane de survie globale) pour ces malades spécifiques. D’autres anomalies biologiques moléculaires (surexpression, mutation, translocation) ont été récemment identifiées. Elles jouent un rôle moteur dans l’oncogenèse bronchique et sont en cours de validation dans des essais de recherche clinique. Ces données nouvelles pourraient permettre dans un futur proche une individualisation des stratégies thérapeutiques, soit par un accès précoce à des molécules innovantes dans le cadre d’essais cliniques, soit par un système d’Autorisation Temporaire d’Utilisation (ATU).
A propos de l’Intergroupe Francophone de Cancérologie Thoracique (IFCT)
Intergroupe coopérateur labélisé par l’INCa et la Ligue Nationale Contre le Cancer, créé en 1999, l’Intergroupe Francophone de Cancérologie Thoracique (IFCT) réunit 500 médecins de plusieurs disciplines, avec pour objectif l’amélioration de la survie et de la qualité de vie des patients atteints d’un cancer du poumon. L’IFCT est promoteur d’études cliniques et s’appuie sur un réseau national de plus de 300 centres (centres hospitaliers universitaires, centres de lutte contre le cancer, hôpitaux généraux et centres privés). Financé par diverses sources de crédits publics et industriels, l’IFCT est fortement attaché à la conduite d’études menées en toute transparence et indépendance.
A propos de l’Institut National du Cancer
L’Institut National du Cancer (INCa) est l’agence d’expertise sanitaire et scientifique en cancérologie de l’État chargée de coordonner les actions de lutte contre le cancer. Créée par la loi de santé publique du 9 août 2004, elle est placée sous la tutelle conjointe du ministère des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes, et du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.
Référence :
Routine molecular profiling of patients with advanced non-small-cell lung cancer: results of a 1-year nationwide programme of the French Cooperative Thoracic Intergroup (IFCT)
Fabrice Barlesi, Julien Mazieres, Jean-Philippe Merlio, Didier Debieuvre, Jean Mosser, Hervé Lena, L’Houcine Ouafik, Benjamin Besse,Isabelle Rouquette, Virginie Westeel, Fabienne Escande, Isabelle Monnet, Antoinette Lemoine, Rémi Veillon, Hélène Blons, Clarisse Audigier-Valette, Pierre-Paul Bringuier, Régine Lamy, Michèle Beau-Faller, Jean-Louis Pujol, Jean-Christophe Sabourin, Frédérique Penault-Llorca, Marc G Denis,Sylvie Lantuejoul, Franck Morin, Quân Tran, Pascale Missy, Alexandra Langlais, Bernard Milleron, Jacques Cadranel, Jean-Charles Soria, Gérard Zalcman, for the Biomarkers France contributors
Lancet, 14 Jan. 2016
DOI: http://dx.doi.org/10.1016/S0140-6736(16)00004-0
(1) EGFR mutations were reported in 1947 (11%) of 17 706 analyses for which data were available, HER2 mutations in 98 (1%) of 11 723, KRAS mutations in 4894 (29%) of 17 001, BRAF mutations in 262 (2%) of 13 906, and PIK3CA mutations in 252 (2%) of 10 678; ALK rearrangements were reported in 388 (5%) of 8134 analyses.

(2) Cancer bronchique non à petites cellules – Référentiel National de RCP, mars 2015 téléchargeable sur le site internet de l’INCa : http://www.e-cancer.fr/Expertises-et-publications/Catalogue-des-publications/Cancer-bronchique-non-a-petites-cellules-Referentiel-national-de-RCP

Contact chercheur
Pr Fabrice Barlesi
Chef du Service d’Oncologie Multidisciplinaire & Innovations Thérapeutiques
Pôle Cardio-Vasculaire et Thoracique – Aix Marseille Université
Assistance Publique – Hôpitaux de Marseille – Hôpital Nord – Chemin des Bourrely
13915 Marseille Cedex 20
E-mail : fabrice.barlesi@ap-hm.fr

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