Le Service Dermatologie du CHU de Reims a cherché à comprendre, au travers d’une étude transversale menée auprès des dermatologues libéraux et hospitaliers, pourquoi les biothérapies, pourtant reconnues efficaces dans la lutte contre les formes sévères de psoriasis, sont si peu utilisées par les professionnels de santé.
En France, un million de personnes vivent avec le psoriasis, une pathologie qui grève lourdement leur vie quotidienne. Depuis 2005, les biothérapies ont enrichi l’arsenal thérapeutique pour le traitement du psoriasis modéré à sévère en France. A ce jour, on estime qu’environ 5 200 patients sont traités, dans l’Hexagone, par cette classe thérapeutique avec des résultats globalement très positifs. Pourtant, malgré l’efficacité reconnue des biothérapies et l’omniprésence de la communication sur ces molécules, leur prescription peine à se développer.
L’équipe du service de Dermatologie du CHU de Reims a souhaité comprendre les raisons de cette désaffection et analyser les freins à la prescription des biothérapies pour le traitement du psoriasis. Une étude transversale a ainsi été lancée auprès de dermatologues libéraux et hospitaliers, d’abord de la région Champagne-Ardenne puis dans le Val de Marne, à Amiens, Auxerre et Orléans. « Nous avons profité d’une FMC (Formation Médicale Continue) pour remettre un questionnaire court, anonyme et standardisé aux dermatologues, explique le Docteur Ziad Reguiai, PH au service de Dermatologie. Il portait sur la connaissance que les dermatologues avaient sur les biothérapies et les craintes et freins éventuels à la prescription de ces traitements. »
Une bonne connaissance des biothérapies était définie par une maîtrise suffisante pour donner des explications claires aux patients (indications, bilan préthérapeutique, complications, effet thérapeutique attendu…). « Nous avons aussi voulu avoir un point de repère en nous comparant à nos confrères rhumatologues qui ont une pratique plus ancienne des biothérapies, en leur remettant ce même questionnaire lors d’une de leurs FMC à Reims », ajoute le Docteur Reguiai.
« Une relation de confiance avec la médecine de ville »
Les résultats, présentés lors du dernier congrès de la Société Française de Dermatologie, se sont révélés éloquents : sur l’ensemble des dermatologues libéraux ayant répondu, seuls 30% étaient capables de parler d’une biothérapie à leurs patients contre 89% des rhumatologues. « Parmi les raisons invoquées, le principal frein était la contrainte de prescription initiale hospitalière », complète le Docteur Reguiai qui analyse : « Cette enquête nous a permis de voir ce qui bloquait. Il s’agit désormais de réexpliquer aux médecins de ville que notre but n’est pas de récupérer tous les patients mais bien de proposer le traitement le plus adapté à chacun. »
Pour l’équipe, la conclusion de l’étude est la suivante : « Pour qu’au fatalisme des patients et de leur médecins traitants ne viennent pas s’ajouter des blocages au niveau dermatologique, une optimisation de la prise en charge est indispensable. Les réseaux de soins peuvent contribuer à cette amélioration par la diffusion d’une information actualisée sur l’ensemble des traitements existants et par le développement d’un partage d’expérience et d’une relation simplifiée et de confiance entre les dermatologies libérale et hospitalière. »
Engagé dans cette démarche de rapprochement ville-hôpital, le service de Dermatologie du CHU de Reims fait partie du ResoPso (qui dispose notamment d’un site Internet qui permet une interactivité http://resopso.fr/ Ce rapprochement s’est également concrétisé par l’ouverture par le Dr Reguiaï de créneaux de consultations spécialement réservés à ses confrères de ville avec des délais de rendez-vous courts. Enfin, tous les dermatologues libéraux intéressés par cette collaboration sont régulièrement tenus informés de tous les protocoles développés dans le service Dermatologie du CHU.
Autant de petits éléments qui nourrissent une relation de confiance entre ville et hôpital, pour le plus grand bénéfice des patients.