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Enquête : comment l’hôpital est-il prêt à réinvestir dans l’humain?

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Alors que se déroulent les concertations du Ségur de la Santé, sur fond d’épidémie de Covid-19, la question se pose, plus aiguë que jamais, de la reconnaissance et de la valorisation des personnels soignants. Les résultats d’une enquête réalisée en amont de la crise auprès des responsables d’établissements publics confirment que l’humain, professionnel ou patient, reste au cœur des préoccupations.

Alors que se déroulent les concertations du Ségur de la Santé, sur fond d’épidémie de Covid-19, la question se pose, plus aiguë que jamais, de la reconnaissance et de la valorisation des personnels soignants. Les résultats d’une enquête réalisée en amont de la crise auprès des responsables d’établissements publics confirment que l’humain, professionnel ou patient, reste au cœur des préoccupations.
Edouard Philippe l’a désigné comme l’un des «enjeux clairs» en préambule du Ségur de la Santé: la reconnaissance du travail du personnel soignant «se traduira dans les rémunérations». Le Premier ministre a promis dans ce contexte une «revalorisation significative des salaires». Dans le cadre de cette vaste concertation autour de notre système de santé, la crise sanitaire sans précédent que connaît le pays avec l’épidémie de Covid 19, laisse attendre une refonte en profondeur de l’hôpital public offrant une plus digne place à l’humain. Un enjeu qui entre en résonance avec l’étude réalisée par le cabinet Mazars auprès de 150 responsables d’établissements publics de santé*.
Au cours des vingt dernières années, le secteur hospitalier a dû accélérer sa transformation sous l’effet conjugué des évolutions démographiques, épidémiologiques et technologiques ainsi que des réformes successives. Cette transformation s’est accompagnée d’une montée des inquiétudes de la part des personnels hospitaliers qui ont trouvé leur résonnance dans les mouvements sociaux qui secouent le secteur hospitalier depuis plus d’un an. Une crise de sens.
« Nous avons réalisé cette enquête auprès des responsables administratifs et médicaux d’établissements de santé publics afin de comprendre leur vision et sonder leurs opinions quant aux choix à réaliser, leviers à activer et innovations à implémenter, explique William Bottaro, Associé Conseil Santé chez Mazars. Et ses résultats trouvent aujourd’hui un écho particulier avec la catastrophe sanitaire en cours».

Prioriser et revaloriser l’humain

Si la quête présumée de performance a longtemps vu l’humain comme un levier de réduction de charges, il est aujourd’hui clairement repositionné à juste titre comme un levier de sortie de crise. « L’humain, professionnel comme patient, détient les clés de la transformation de l’hôpital pour redonner du sens au soin et créer une nouvelle relation patient/soignant », souligne William Bottaro.
88 % des répondants priorisent la réalisation des investissements sur les Ressources Humaines
Tous les chantiers priorisés par les responsables hospitaliers sont engagés pour un impact positif social et humain pour les personnels soignants (recrutement, formation continue, …).
65% des responsables hospitaliers citent comme priorité le renforcement capacitaire des effectifs dans les services de soins. Projeter l’opérationnalité de cette action nécessite une réflexion avancée sur les enjeux d’attractivité, de fidélisation et de reconnaissance des professionnels de santé. Dans ce sens, l’amélioration des conditions salariales est identifiée par les répondants comme étant un sujet primordial à traiter: 60% des responsables hospitaliers citent comme priorité l’amélioration des conditions salariales pour les personnels hospitaliers.

Attractivité, fidélisation et sentiment d’appartenance

75% des répondants déclarent prévoir de mettre en œuvre ou avoir déjà mis en œuvre des actions visant à améliorer l’attractivité et/ou la fidélisation des professionnels au sein de leur établissement.
Pour répondre à cette priorité, le développement de la marque employeur apparaît comme une stratégie à tester et à adapter à l’hôpital public : 17% des personnes interrogées dans l’étude ne connaissent pas le sujet de la marque employeur pour l’hôpital alors que de plus en plus d’expériences se développent dans le secteur et paraissent prometteuses. Derrière le sujet de la marque employeur, c’est aussi l’expression de la nécessaire réaffirmation du sentiment d’appartenance et du repositionnement du sens au travail au sein de l’hôpital public.

Le management participatif plébiscité

Repenser les rapports humains à l’hôpital invite les hôpitaux publics à repenser leur organisation et leur management.

75% des répondants plébiscitent un management participatif et collégial avec les soignants et médecins à l’instar des hôpitaux labélisés «magnétiques». Cet engouement témoigne de l’aspiration des professionnels de santé à gagner en autonomie et à s’investir davantage dans les projets et décisions internes pour un plus grand impact sur leur propre travail et, donc, sur la qualité de la prise en charge des patients. A noter que directions comme responsables médicaux font preuve d’un intérêt commun pour l’avènement d’un management plus participatif.

C’est cette même recherche d’«empowerment» ou d’«encapacitation» des équipes hospitalières qui anime plus de 40% des personnes interrogées ambitionnant une plus grande implication des collaborateurs dans les démarches projets ainsi qu’une plus grande autonomie des équipes dans l’organisation de leur travail et la gestion de leur temps. Pour autant, rares sont encore les expériences réellement menées sur le terrain pour créer interprofessionnalité et décloisonnement.

Le centre hospitalier de Valenciennes s’est ainsi impliqué dans la culture de l’hôpital magnétique depuis 10 ans avec une gouvernance partagée avec les praticiens, inspirée par l’organisation dite « polaire ». Ce modèle a permis un travail profond sur le mode de gouvernance qui s’illustre entre autres dans son projet d’établissement : un meilleur accueil et une meilleure intégration des professionnels, la création d’un parcours de cadres infirmiers, la visibilité et la coordination des projets, une meilleure prévention des RPS, l’identification des compétences et la mobilité des professionnels.

L’expérience patient, un levier de transformation

84% des personnes interrogées se disent sensibilisés à «l’expérience patient», qu’elles aient ou non déjà mené un projet expérience patient. Mais les réalisations en sont encore à leurs balbutiements. 61% des personnes interrogées déclarent qu’aucune démarche "expérience patient" n’a été lancée dans leur établissement à ce jour quand seulement un quart (27%) a lancé une expérimentation terrain.
Les freins à l’amélioration de l’expérience patient identifiés par les professionnels eux-mêmes sont liés à 43% à leur situation et conditions de travail (épuisement, burn-out, stress, charge de travail, …) et à 40% aux ressources insuffisantes (financières, humaines, …), puis au fait que les établissements semblent se concentrer sur d’autres priorités. La prise en compte de l’expérience patient est donc aussi un enjeu des ressources humaines à l’hôpital.

L’implication des patients dans l’organisation des soins peut être perçue comme un facteur de transformation du système de santé, analysent les auteurs de l’étude. Le rôle du patient-partenaire pourrait dépasser les murs de l’hôpital au service de démarches inter et pluriprofessionnelles relatives au parcours du patient.

« L’urgence de la crise sanitaire que nous subissons aujourd’hui a très tôt révélé le besoin impérieux de remettre des moyens humains et matériels dans les établissements hospitaliers et aussi améliorer le système de prise en charge global, ce qui ne peut s’envisager que par une réorganisation des silots, du mode de financement des hôpitaux et aussi un necéssaire repositionnement du sens au travail au sein de l’hôpital public », conclut William Bottaro.
Découvrez l’intégralité de l’étude Mazars «L’hôpital face à ses défis: le pari de l’humain»
* Cette étude a été réalisée par Mazars avec l’institut de sondage OpinionWay, du 16 décembre 2019 au 10 janvier 2020, sur un échantillon de 150 responsables d’établissements public de santé, représentatif des établissements nationaux, comptant de 250 à 4999 salariés

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