Affronter la réalité malgré la maladie. Les appartements collectifs construisent une passerelle de l’hôpital vers l’autonomie du patient. Avec le soutien de l’équipe médicale et paramédicale, les patients de psychiatrie réapprennent simplement à vivre au quotidien…
Dans une rue non loin du centre-ville, au troisième et dernier étage d’un petit immeuble sans ascenseur, la porte s’ouvre sur un jeune homme souriant. Thierry*, sous-locataire des lieux, a intégré depuis peu ce logement où résidait déjà François*. Les infirmières les rejoignent autour d’un café. C’est mercredi, jour de repas thérapeutique. Tout à l’heure, tout le monde fera les courses, préparera puis partagera le dîner.
Les personnes qui résident dans les deux appartements collectifs du PHU 8 sortent souvent d’une période plus ou moins longue d’hospitalisation en psychiatrie, comme François, ou éprouvent des difficultés à assumer seuls le quotidien en raison de leur maladie, comme Thierry : « On passe par les apparts pour se reprendre en charge doucement. »
Le CHU loue des logements à des bailleurs sociaux, puis les sous-loue à des patients, sur indication médicale. Les soignantes se chargent de la paperasse… entre autres, car, comme elles l’expliquent en souriant, elles jouent un peu tous les rôles : aides-assistantes sociales, relais avec l’institution, les partenaires associatifs, les curateurs, les bailleurs, les familles… « On porte le projet initial du secteur, et on soutient les démarches et désirs du patient. Nous passons trois demi-journées par semaine au moins dans chacun des deux appartements, avec leurs occupants. Plus une hebdomadaire de deux heures avec le psychologue, Pierrick Brient, et le médecin responsable, le Dr Anne-Laure Hubert, et une réunion soignants-soignés tous les 15 jours au centre médico-psychologique (CMP) avec tous les locataires. »
Dans l’intervalle, les résidents doivent assurer l’entretien des locaux et leur vie quotidienne, en respectant les engagements du contrat de soins passé avec l’’équipe : passer un temps déterminé au CATTP ou à l’hôpital de jour, travailler pour certains… Il s’agit bien de redynamisation : il faut apprendre ou réapprendre à se lever le matin, prendre son traitement, passer la nuit et les week-ends seuls, respecter des horaires, assumer ses obligations, renouer parfois des liens brisés avec la famille… Sans « fliquer », les deux infirmières gardent un œil sur ce qui se passe, veillant aux éventuels signes d’alerte, recadrant les choses quand il le faut… « Ça se passe globalement bien. Depuis le démarrage du projet en 2005, nous avons 100 % de réussite pour ceux qui ont mené à bien le contrat d’un an ! Ils sont aujourd’hui réinsérés et autonomes, avec suivi CMP, et ils nous donnent des nouvelles car nous tissons forcément avec eux des liens privilégiés. »
« Le plus important est de prendre conscience de sa maladie et l’accepter. Ensuite, le séjour ici sert à apprendre à vivre avec… », résume François.
Les deux appartements, peuvent accueillir jusqu’à quatre personnes, hommes et femmes. Un contrat de sous-location de trois mois, renouvelable trois fois, est établi avec le CHU. Chacun dispose de sa chambre verrouillable. Tous partagent cuisine, salle de bain, pièce de vie.
Comme dans n’importe quelle colocation, ils s’entendent pour partager ou non les repas, se répartir les tâches ménagères, fixer et respecter les règles de bonne cohabitation.