Les équipes du Service de Neurologie Fonctionnelle et d’Epileptologie (hôpital neurologique Pierre Wertheimer), et de l’Institut Des Epilepsies de l’Enfant et de l’adolescent (IDEE, hôpital Femme Mère Enfant) des HCL viennent de démontrer pour la première fois une différence significative de réponse au placebo chez les enfants par rapport aux adultes, dans le cadre d’essais thérapeutiques. Ces travaux, dirigés par le Pr Philippe Ryvlin, devraient avoir des conséquences très importantes pour la réalisation de futurs essais pédiatriques dans le domaine de l’épilepsie, et de la médecine en général. Ils ont été publiés le 12 août dernier dans PLOS Medicine, l’une des plus importantes revues scientifiques.
Il s’agit d’une méta-analyse* d’études de nouveaux médicaments anti-épileptiques testés d’une part chez l’adulte et d’autre part chez l’enfant. Comme pour toutes les pathologies, la mise à disposition de nouveaux médicaments passe par la démonstration de leur efficacité. Cela nécessite le plus souvent de les comparer à un placebo dans des études dites de « double-aveugle » : le médecin investigateur tout comme le patient ne savent pas s’ils reçoivent pendant la période de l’étude le véritable médicament ou un pseudo-médicament, le placebo. En effet, quelle que soit la pathologie concernée, un certain nombre de patients voient leur état de santé s’améliorer sous placebo (ce phénomène est appelé « réponse au placebo »). Il convient alors de ne pas attribuer à tort cette amélioration à l’effet du médicament testé.
Importance de la réponse au placebo pour tester l’efficacité d’un nouveau médicament
L’importance de la réponse au placebo est fondamentale pour définir correctement le nombre de sujets à inclure dans une étude et tester de manière appropriée l’efficacité d’un nouveau médicament. Plus la réponse au placebo est importante, plus il faudra inclure de sujets pour démontrer l’efficacité du traitement. Dans la mesure où l’on ne connaît à l’avance la réponse des patients ni à un nouveau traitement, ni au placebo, il est nécessaire de faire des hypothèses fondées sur les résultats d’études antérieures. Si les hypothèses sont justes, on peut évaluer de manière appropriée l’impact d’une nouvelle thérapeutique. Si la réponse au placebo a été sous-estimée, le nombre de sujets inclus sera insuffisant ; on ne parviendra donc pas à démontrer l’efficacité d’un médicament et ce, pour des raisons purement statistiques. A l’inverse, si l’on surestime la réponse au placebo, on sera amené à inclure plus de patients que nécessaire, ce qui représente un problème éthique du fait des contraintes imposées par les essais thérapeutiques.
Une réponse au placebo deux fois plus importante chez l’enfant que chez l’adulte
Dans l’épilepsie comme dans beaucoup d’autres maladies affectant les différents âges de la vie, les nouveaux médicaments sont d’abord évalués chez l’adulte et longtemps après chez l’enfant. Cet état de fait, qui prive pendant de nombreuses années les enfants des traitements les plus modernes, fait à présent l’objet de recommandations très appuyées des agences du médicament américaines et européennes afin que les nouveaux médicaments soient testés le plus rapidement possible chez l’enfant.
Dans ce contexte se pose donc la question de savoir comment anticiper la réponse au placebo dans la population pédiatrique. Jusqu’à présent, et notamment dans le domaine de l’épilepsie, les études pédiatriques faisaient l’hypothèse que la réponse au placebo devait être équivalente à celle observée dans la population adulte.
L’étude dirigée par le Pr Ryvlin montre qu’en réalité la réponse au placebo est deux fois plus importante chez l’enfant que chez l’adulte. Lorsqu’on prend comme critère d’analyse la diminution d’au moins 50 % de la fréquence des crises d’épilepsie sous traitement, le taux moyen de répondeur sous placebo chez l’adulte est de 10 % alors qu’il est de 20 % chez l’enfant. Ce résultat devrait avoir des conséquences très importantes pour la réalisation de futurs essais pédiatriques dans le domaine de l’épilepsie, mais probablement au-delà dans le domaine de la médecine en général.
* Méta-analyse : Regroupement et analyse détaillée de l’ensemble des travaux scientifiques réalisés dans un domaine particulier, permettant d’aboutir à des conclusions plus robustes que celles émises à partir de chacun des travaux pris isolément.
La recherche en pédiatrie aux HCL
– 524 publications au cours des 5 dernières années
– une soixantaine de projets de recherche en cours
Les programmes de recherche concernent de nombreux domaines : nutrition, sommeil, psychopathologie, maladies infectieuses rares, hématologie pédiatrique, neuropédiatrie, épilepsie…
Les HCL concentrent des forces très importantes dans le développement des essais thérapeutiques chez l’enfant, et se positionnent comme une structure de pointe dans ce domaine du progrès médical à l’échelle nationale et européenne.
Pour plus d’informations : Pr Philippe Ryvlin : 04 72 35 70 44
philippe.ryvlin@chu-lyon.fr