Menacés d’asphyxie par l’envolée du franc suisse face à l’Euro, les hôpitaux ayant contracté des emprunts toxiques ont dénoncé les risques majeurs pour leur trésorerie dans un courrier adressé au Président de la République. Leur appel a été entendu et une majoration de 300 millions d’euros sur trois ans a été allouée à leur fonds de soutien le portant au total à 400 millions d’euros.*
Emprunts toxiques : la flambée suisse
Mi-janvier de la Banque nationale suisse décide de renoncer à l’instrument qui limitait la hausse du franc suisse face à l’euro. Immédiatement les taux d’intérêts et les indemnités de remboursement anticipés des emprunts dits toxiques contractés notamment auprès de la banque Dexia et indexés sur le taux de change entre ces deux devises ont explosé, passant de 15 à 25% rappelle l’AFP.
Le JDD du 22 février révèle la liste des établissements les plus touchés et le ration des surcoûts sur le montant total des emprunts : trois CHU, Saint-Etienne, Brest et Dijon avec respectivement 14,46 %, 24,75% et 26,71%,
et des CH : Le Havre 27,15% , CH du Cateau-Cambrésis 26,45% CHS de Sarreguemines 29, 93% , CHG de Sélestat 41,19% , Syndicat inter-hospitalier de Juvisy-sur-Orge 42,6%, CH du Sud-Ouest Mayennais 50,39%, Hôpital intercommunal de Sèvre et Maine de Vertou 43,39%, CH de Rambouillet 31,95%, CH de Monluçon 23,34%, CH de Bazas 21,34%, CH de Rodez 35,26%, CH des Vals d’Ardèche 30,92% CH intercommunal de Toulon-La-Seyne-sur-mer 30,01%, CH général d’Ajaccio 30,98%, CH de Briançon 23,17% et le CH intercommunal du Léman 31,41% .
Alarmés les hospitaliers ont adressé un appel solennel au Président de la République par courrier daté du 11 février. Dans cette missive** rendue publique, ils soulignent que les banques "ont commercialisé des emprunts toxiques aux hôpitaux, dont certains indexés sur des monnaies étrangères. Le juge judiciaire, saisi de ces affaires à plusieurs reprises, a systématiquement condamné les banques impliquées, jugées coupables de ne pas avoir respecté les formes et d’avoir abusé de la confiance des hospitaliers, tout comme d’ailleurs des dirigeants de collectivités locales."
Les responsables dénoncent l’interdiction qui leur a été faite par le législateur de poursuivre les banques au contentieux "les privant par la même de la possibilité de faire valoir leurs intérêts et de préserver leurs finances". Sans recours possible, « une première dans l’histoire du droit » précisent-ils, les hôpitaux publics ont en contrepartie eu accès à un fonds de compensation de 100 millions d’euros répartis sur 3 ans, financés aux 3/4 sur les budgets hospitaliers. Avec l’envolée du franc suisse la donne a changé. Les hôpitaux ont vu leur dette s’alourdir de plusieurs centaines de millions d’euros. Cette flambée rend "obsolète" le fonds de soutien et le plan d’économies ne servira plus qu’à payer, aux banques, le surcout de la dette. Ces déficits mécaniquement grevés obligeront les hôpitaux à sacrifier leurs investissements.
Les directeurs réclament la mise en place d’un dispositif gouvernemental de règlement de la dette des hôpitaux qui mettra à contribution financière des établissements bancaires. Ces derniers "ne peuvent aujourd’hui décemment pas engranger des centaines de millions d’euros de profit supplémentaires au détriment des hôpitaux qu’ils ont pourtant abusés."
Les menaces sont claires : recours et cessation du paiement des intérêts "Nous avons décidé (…) de former des recours contentieux auprès de la Cour de justice de l’Union européenne conjointement aux plaintes déposées auprès de la commission européenne et la pétition au Parlement européen.
En outre les responsables hospitaliers concernés se réserveront le droit de geler le paiement des intérêts dus aux banques."
Les hospitaliers très vite entendus
Le 24 février, suite à une réunion mardi avec les représentants des collectivités et des hôpitaux, les ministres Christian Eckert (Budget) et Marisol Touraine (Affaires sociales), le Gouvernement annonçait des aides financières supplémentaires pour les hôpitaux et les collectivités et de nouvelles mesures parmi lesquelles l’accord de délais des délais de paiement de la Société de financement local (Sfil), ex Dexia, « dans l’attente de l’intervention du fonds. la Sfil verra avec ces collectivités le moyen de gagner les mois nécessaires pour arriver à une solution complète » détaille l’AFP.
Pour les collectivités : 3 milliards d’euros sur 15 ans financés pour moitié par les banques – via une majoration de la taxe sur le risque systémique et pour moitié par l’Etat.
Pour les hôpitaux, le fonds de soutien des hôpitaux de 100 millions sur trois ans sera majoré de 300 millions sur dix ans. Ces ressources supplémentaires seront "intégralement" apportées par les banques (soit 30 millions par an), ont déclaré Marisol Touraine et Christian Eckert, secrétaire d’Etat au budget dans un communiqué commun.
En réponse, le jour même, la FHF saluait dans un communiqué la décision de porter à 400 millions le fonds de soutien. Ce besoin avait été évalué à 500 millions d’euros et à 3,5 milliards d’euros la sortie définitive des emprunts toxiques hospitaliers.
Par la voix de son président Frédéric Valletoux, la Fédération se félicitait de la mise à contribution (300 millions d’euros) directe des banques, reconnaissant ainsi leur pleine responsabilité dans la commercialisation de produits financiers à haut risque
Dans les Échos du même jour, Marisol Touraine précisait que "les établissements de petite taille qui ont contracté une grande quantité d’emprunts, et qui sont aujourd’hui étranglés par la dette. Il y en aura des dizaines, peut-être 50, 70, 80…", seront aidés en priorité pour le règlement des intérêts et la sortie de l’emprunt.
La FHF retient également l’engagement du gouvernement et de la société de financement local (SFIL ex. DEXIA), détenteur de 70% de l’encours des emprunts toxiques hospitaliers, de ne pas modifier les annuités de remboursement, et neutraliser ainsi la montée brutale du franc suisse. Elle demande qu’il en soit de même pour les autres banques qui ont commercialisé ces produits illisibles et dangereux.
La FHF suivra avec attention l’engagement du secrétaire d’Etat au budget monsieur Christian Eckert qui doit proposer par modification législative, le déplafonnement de l’aide actuellement fixée à 45% de l’encourt de la dette en cas de remboursement anticipé.
Epidémie de grippe
La grippe 2015, plus sévère que les années précédentes, aura touché entre 4,5 et 5 millions de personnes selon Marisol Touraine, ministre de la Santé. Carte du réseau sentinelle rouge et orange à l’appui, tous les médias ont relayé l’information, rappelant que l’on meurt encore de grippe et que « le vaccin ne fonctionnait pas bien ». "Le virus a muté, d’autres souches sont apparues face auxquelles le vaccin est moins efficace" a reconnu Marisol Touraine, l’estimant "néanmoins efficace par rapport à certains types de grippe".
Jeudi 12 février, la ministre déclenchait le plan Orsan d’organisation de l’offre de soins en situations sanitaires exceptionnelles et… une polémique involontaire puisque « ce plan n’est pas encore effectif » ironisait Eric Favereau dans Libération du 23 février. Le même jour l’AFP rassurait : le pic épidémique avait enfin été franchi.
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*Les collectivités locales sont aussi touchées. Dans un article du figaro du 19 janvier, Mathilde Golla constate qu’en une journée, le coût de la dette a doublé» prenant l’exemple du Conseil général de l’Ain où sur une dette globale de 420 millions d’euros, 10% des encours constitués d’emprunts toxiques. Parmi eux, un prêt de 9,8 millions d’euros est adossé au franc suisse. En une journée, son taux d’intérêt est passé de 8,5% à 29%! Le coût de la dette a donc doublé, passant de 2 à 4 millions d’euros».
**cosignée par Philippe Domy, Président de la Conférence des directeurs Généraux de CHU, Frédéric Martineau, Président de la Conférence des Pdts de CME de CH, Pr Guy Moulin, Président de la Conférence des Pdts de CME de CHU, Christian Muller, Président de la conférence des Pdts de CME de CHS, Zaynab Riet Présidente de la Conférence des directeurs de CH, Frédéric Valletoux Président de la Fédération hospitalière de France
Marie-Georges Fayn
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