Un virus modifié pour détruire spécifiquement les cellules cancéreuses du pancréas a fait ses preuves in vitro et in vivo, ouvrant la voie à un essai clinique chez l’homme. Un nouvel espoir pour les cliniciens souvent démunis face à ce cancer redoutable.
Au sein du nouvel Institut Universitaire du Cancer de Toulouse (IUCT), l’équipe dirigée par Pierre Cordelier du Centre de recherches en cancérologie de Toulouse (unité 1037 Inserm/Université Toulouse III-Paul Sabatier/ERL CNRS 5294), étudie la faisabilité d’un traitement reposant sur l’injection de virus oncolytique, c’est à dire capable d’infecter et de détruire spécifiquement les cellules cancéreuses. Ce travail est réalisé en collaboration avec le service de gastro-entérologie du Pr. Louis Buscail, également chercheur dans l’équipe de la même unité Inserm. L’idée n’est pas nouvelle et plusieurs autres équipes à travers le monde ont déjà testé certains virus dans différents cancers. Cette fois, les chercheurs ont travaillé avec un virus dérivé d’Herpès simplex, rendu inoffensif vis-à-vis des cellules saines de l’organisme mais capable de se répliquer spécifiquement dans les cellules cancéreuses du pancréas, et de les détruire.
Des tests in vitro et in vivo réalisés et prometteurs
In vitro, le virus se comporte comme attendu, n’affectant pas les cellules saines du pancréas mais se multipliant dans les cellules cancéreuses, se propageant dans les cellules malades voisines et les éliminant. Les chercheurs ont donc testé in vivo, sur des tumeurs humaines greffées à des souris. Une unique injection du virus modifié, associée à une chimiothérapie, a drastiquement réduit la taille des tumeurs, sans effet indésirable dangereux pour les animaux.
La preuve de concept
« L’approche oncolytique est étudiée depuis longtemps pour une raison simple : alors qu’une cellule saine lutte efficacement contre la réplication d’un virus, une cellule cancéreuse est beaucoup plus vulnérable. Le processus de cancérisation fait sauter des verrous protecteurs, facilitant l’entrée et la réplication des virus dans ces cellules malades », explique Pierre Cordelier, responsable de l’étude et directeur de recherche au Centre de recherches en cancérologie de Toulouse. « Mais il faut utiliser un virus qui reconnaît très spécifiquement les cellules concernées et très efficace d’emblée, car, pour le moment, le traitement repose sur une injection intratumorale unique, combinée à la chimiothérapie de référence.», explique-t-il.
Avec ces travaux, les chercheurs ont apporté la preuve de concept de l’efficacité de ce virus modifié. « Il s’agit d’une nouvelle ère thérapeutique contre le cancer du pancréas», estime Pierre Cordelier. «Plus rien ne s’oppose au lancement d’un essai clinique chez l’homme, si ce n’est l’organisation, la réglementation et le coût. », estime-t-il. « Notre partenaire industriel Karcinolys prévoit encore un développement préclinique de 18 mois, avant d’obtenir les autorisations nécessaires à la conduite d’une phase I. Mais compte tenu de la pauvreté de l’arsenal thérapeutique contre ces tumeurs et de notre expérience dans ce domaine, il y a de bonnes chances pour que cela ait lieu ! Au cours de cet essai, il faudra par ailleurs rechercher des marqueurs prédictifs de réponse au traitement, afin de pouvoir, à terme, administrer le virus aux patients qui en bénéficieront le plus » espère le chercheur.
Source : M. Gayral et coll. Targeted oncolytic HSV-1 eradicate experimental pancreatic tumors. Hum gene Ther, édition en ligne du 25 novembre 2014
Le cancer du pancréas
2ème cancer de l’appareil digestif après le cancer colorectal, le cancer du pancréas est difficile à diagnostiquer à un stade précoce. Ce retard fait de lui un des cancers les plus redoutables. Selon l’Inca, 9 000 nouveaux cas étaient diagnostiqués en 2011. Les hommes et les femmes de plus de 50 ans étant touchés dans les mêmes proportions.
L’IUCT, une nouvelle dynamique pour lutter efficacement contre le cancer
L’Institut universitaire du cancer de Toulouse (IUCT), présidé par le Professeur André Syrota, est un nouveau modèle français de coordination des soins, de recherche et de l’enseignement en cancérologie. C’est une démarche collective et volontaire de tous les acteurs publics et privés de l’oncologie en Midi-Pyrénées engagés en faveur la qualité de prise en charge du patient quel que soit son lieu de résidence dans la région.
A leur actif une politique et des actions de coopération dans le domaine de la cancérologie afin de développer les activités de recherche, favoriser les liens entre le soin et la recherche, assurer la formation et la diffusion des connaissances médicales et scientifiques, construire des parcours de soins coordonnés pour les patients.
Les partenaires de l’IUCT
– Centre hospitalier universitaire de Toulouse
– Institut Claudius Regaud
– Université Toulouse III – Paul Sabatier
– Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale)
– Communauté urbaine Toulouse métropole
– GCS des hôpitaux publics de Midi-Pyrénées
– GCS de cancérologie privée de Midi-Pyrénées
– Oncomip
– Ligue nationale contre le cancer
– Fondation Toulouse Cancer Santé