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Greffe de foie in extremis ou comment le CHU de Toulouse a sauvé une gastronome friande de champignons

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Alors que les greffons sont rares, les équipes du CHU de Toulouse ont pu transplanter un foie en urgence sur une personne de 70 ans et partager la joie de son rétablissement avec ses proches. La patiente et sa famille, les services d'urgence, de chirurgie digestive et les anesthésistes et réanimateurs se souviendront longtemps du 16 novembre 2018. Récit d'une course contre la montre...

Alors que les greffons sont rares, les équipes du CHU de Toulouse ont pu transplanter un foie en urgence sur une personne de 70 ans et partager la joie de son rétablissement avec ses proches. La patiente et sa famille, les services d’urgence, de chirurgie digestive et les anesthésistes et réanimateurs se souviendront longtemps du 16 novembre 2018. Récit d’une course contre la montre…
Le 16 novembre dernier, une septuagénaire arrive aux urgences. Victime d’une très grave intoxication alimentaire provoquée par des amanites phalloïdes consommées deux jours avant, elle souffre de vomissements, de diarrhées, de fortes douleurs et d’un important affaiblissement. La dame est aussitôt placée en réanimation. 
Le diagnostic est très vite porté. La dame souffre d’une hépatite aiguë toxique semblant être due aux champignons. Plus le temps passe, plus son état s’aggrave. À 2 h 00 du matin, la cytolyse dont la mesure normale est au maximum de 35 était montée à 1 209. À 9 h 00 du matin, la cytolyse hépatique s’élevait à 3 800. Le foie se dégrade si vite qu’il devient manifeste que la septuagénaire est condamnée à très court terme.
Cette perspective tragique provoque la tenue immédiate d’une concertation pluridisciplinaire réunissant les professeurs Bertrand Suc, Fabrice Muscari et Nassim Kamar, ainsi que les docteurs Arnaud Del Bello, Olivier Cointault et Jean-Pierre Duffas, spécialiste de la greffe des organes digestifs. « La décision a alors été prise collectivement, relate ce dernier, d’inscrire cette patiente sur la liste d’attente des demandeurs d’organes, un foie en l’occurrence. »
Cette initiative est prise dans la journée du 17 novembre. Alors que le délai de survie de la patiente n’est plus que de quelques heures et que la possibilité de trouver un organe adéquat est toujours très aléatoire, un quasi « miracle » se produit. Une proposition de greffon compatible était reçue.
La course contre la montre a débuté le 17 novembre pour s’achever le lendemain enfin de journée.
Suite à l’annonce, une équipe chirurgicale du CHU de Toulouse, composée du Dr Mathieu Lallement et d’un interne, a donc pris aussitôt un avion privé pour effectuer le prélèvement du greffon dans la nuit sur un patient en état de mort cérébrale.
Partis de Toulouse en pleine nuit à 0 h 50, avec le matériel du CHU et l’aide d’une infirmière coordonnatrice, les médecins sont parvenus en un temps record à effectuer le prélèvement et à revenir au petit matin, afin que la greffe puisse être aussitôt réalisée.
Le 18 novembre à 10 h 30, l’anesthésiste intervient, l’opération débute à 12 h 30. Elle dure 4 heures 30, avec l’extraction du foie de la patiente et ensuite la greffe du foie prélevé durant la nuit.
À l’issue de l’opération dont le déroulement a été très satisfaisant, la septuagénaire est restée plusieurs jours en réanimation. Après un séjour d’un mois à l’hôpital, elle est aujourd’hui en maison de convalescence et fait depuis l’objet d’un suivi par l’équipe de greffe. Elle prend un immunosuppresseur pour l’aider à tolérer ce foie qui n’est pas le sien. Alors que les greffes de foie sont assez fréquentes, cette intervention a été exceptionnelle par son déroulement et son aboutissement inespéré : « Il est rare, ajoute le Dr Duffas, de parvenir à sauver ce type de patient, du fait de la difficulté de disposer très rapidement d’un greffon. Cette réussite est le fruit de la pluridisciplinarité et de la disponibilité des personnels d’astreinte et de ceux qui sont intervenus au pied levé en plein week-end. »
«L’intervention a été rendue possible grâce au travail de coordination effectué par l’Agence de la biomédecine qui gère au plan national le don d’organes». souligne l’équipe
Témoignage du fils de la patiente
Marc, le fils de la septuagénaire, se félicite d’avoir choisi il y a un an d’habiter près du domicile de sa mère. Cette proximité lui a permis d’observer la dégradation rapide de l’état de santé de celle-ci et d’alerter un médecin généraliste. « Au début, se souvient-il, on a cru à une grippe. Mais quand on a vu qu’elle vomissait, puis se déshydratait, on a compris que c’était grave, sans savoir que cela pouvait provenir des champignons. Le médecin l’a envoyée aux urgences à Purpan où elle a été stabilisée. Puis elle a été transférée à Rangueil. On ne pensait pas que c’était si préoccupant, mais on a compris lorsque l’on nous a dit qu’elle était victime d’un empoisonnement, puis qu’elle avait besoin d’une greffe du foie. Quand le médecin nous a confié que sans cela elle ne passerait pas le week-end, on a été plongé dans le désespoir. On a eu beaucoup de chance de trouver un greffon dans de telles conditions. Les chirurgiens ont fait un super travail. C’est un vrai miracle. Ma mère connaît une seconde vie. Elle est très heureuse de s’en être sortie. Et moi, je suis heureux pour moi et pour elle, car je n’ai qu’elle. »
La greffe de foie en chiffres
 En France, 1 374 greffes du foie ont été réalisées en 2017. Les malades greffés en urgence pour des maladies aiguës du foie (hépatites fulminantes) représentent 4 % des malades adultes inscrits sur liste d’attente et 27 % des malades de moins de 18 ans. Les maladies du foie aiguës à l’origine de ces greffes sont représentées majoritairement par : des non-reprises de fonction du greffon lors d’une première transplantation ; des intoxications médicamenteuses et des intoxications fungiques. Ces malades accèdent à une liste d’attente spécifique dite de « super-urgence ». Cela leur permet d’avoir un greffon rapidement. Cependant, dans ces états graves chaque heure qui passe est importante, puisque le taux de décès sur liste d’attente dans cette situation d’un greffon hépatique est estimé à 13 %. La survie de ces malades à long terme, à 10 ans, est bonne (64 %). Elle est directement dépendante de l’état de gravité au moment de la transplantation qui lui dépend de la rapidité à obtenir un greffon. 

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