C’était un appel à l’action. Le 1er mars dernier, dans une interview accordée à Réseau CHU, Maryna Kalinina, étudiante en cinquième année de médecine, sollicitait le CHU de Bordeaux pour envoyer de l’aide à la population ukrainienne, alors que le monde était toujours en état de sidération face à l’agression glaçante de la Russie de Poutine envers son petit frère ukrainien. Rapidement, plusieurs CHU – Lille, Marseille etc. – s’étaient engagés à livrer du matériel et des médicaments. Et alors que la guerre se poursuit, c’est bien l’ensemble de la communauté CHU qui se retrouve impliqué, avec un objectif : « contribuer au renfort des capacités sanitaires en Ukraine en dégageant des ressources opérationnelles non neutres », comme l’exprime un communiqué publié par la Conférence des Directeurs Généraux de CHU.
Un apport logistique continu et conséquent
Sans tomber dans le catalogue exhaustif, il est tout de même possible d’avoir une vue d’ensemble de cette aide matérielle. A Lille, ce sont vingt palettes de matériel médical qui sont parties du CHU, une livraison comprenant trente mille unités de médicaments, mais aussi des pansements, des dispositifs de ventilation, des respirateurs de secours. Et il n’est pas le seul, loin s’en faut. Dijon-Bourgogne, Caen Normandie, Reims, Tours, Bordeaux, Nancy, Nantes, Nîmes, Orléans, l’APHP, les Hospices civils de Lyon, l’APHM, Toulouse, Rennes… tous ont envoyé des chargements similaires afin de permettre les meilleures conditions de soins possibles aux Ukrainiens. Dans plusieurs cas, l’effort s’est joint à celui des collectivités. Exemple significatif : suite à la collecte organisée par l’APHM et la ville de Marseille, 80 m3 de dons ont été envoyés en Pologne, à la frontière ukrainienne. Trois ambulances chargées de matériel ont été par ailleurs acheminées jusqu’à Odessa, ville du sud de l’Ukraine et jumelle portuaire de la cité Phocéenne.
L’équipement médical et de soin ne constitue pas la totalité de l’aide matérielle apportée. Le CHU de Clermont Ferrand à également envoyé des couvertures, des couettes, des chaussettes, des vêtements d’hiver, des compléments nutritionnels ou encore près de deux mille masques FFP2. De son côté, le CHRU de Tours a réuni du matériel de première nécessité dont des sacs de couchages, plaids, oreillers, produits d’hygiène, vaisselles réutilisables, lits de camp.
Une prise en charge médicale et psychologique
En complément de l’envoi de matériel et la mise en place de dispositifs médicaux pour les soignants en Ukraine (rejoints par des médecins français, à l’image de Philippe Juvin, chef de service des urgences de l’hôpital européen Georges-Pompidou AP-HP), les CHU ont également pris en charge des réfugiés. En effet, enfants et adultes ont été ponctuellement accueillis pour des soins de spécialités difficilement réalisables sur place. Deux enfants ukrainiens ont ainsi été transférés jusqu’au CHU Caen-Normandie afin d’accéder à des soins. De la même façon, le CHU de Montpellier à créé un « Pôle Urgences / CUMP34 », composé de vingt-neuf professionnels de santé volontaires, afin de prendre en charge des Ukrainiens. Autre chiffre donné par la Conférence des DG de CHU : plus de 200 patients ont été accueillis au sein des 23 hôpitaux de l’APHP. Et à l’est comme à l’ouest de l’hexagone, on a pris en charge des enfants dans les services onco-hématologie et onco pédiatrique. A Nancy, une équipe du SAMU a été mobilisée pour accueillir des bus de réfugiés ukrainiens. A Rennes, c’est la mère d’un jeune patient qui a pu être hébergée à la Maison des familles. Les exemples ne manquent pas. Les Hospices Civiles de Lyon et CHU de Metz-Thonville ont eux aussi permis à des patients d’obtenir des soins spécialisés.
Comme tous les conflits touchant des populations civiles, la guerre laisse son lot de traces dans des millions d’esprits marqués à vie. L’aide psychologique, vitale pour ses populations déplacées, endeuillées, blessées, est aussi l’une des composantes de l’aide apportée par les CHU. Des pédopsychiatres du CHU de Reims sont notamment intervenus, accompagnés d’une permanence d’accès aux soins de santé regroupant des étudiants et professionnels interprètes. En Occitanie, le CHU de Toulouse, qui a envoyé sept palettes de matériel, s’est illustré sur ce volet psychologique avec un dispositif impliquant la PASS et la CUMP (Cellule d’urgence médico-psychologique).
Bref, de nombreuses actions continuent d’enrichir l’action des CHU. Un engagement qui a souvent été « à l’initiative des nombreux personnels qui se sont sentis concernés par ce conflit, qu’ils soient soignants, techniques, ou administratifs », comme le rappelle la présidente de la Conférence, Marie-Noëlle Gérain Breuzard.
Pauline Villesuzanne