Souvent spectaculaire et audacieuse, l’architecture hospitalière reflète l’engagement des hommes pour sauver et protéger l’humain. Cet élan salvateur s'est manifesté de façon très différente dans les soins psychiatriques qui furent longtemps tenus à l’écart du monde. Les progrès médicaux aidants, il a été possible de maîtriser les symptômes à l’aide de neuroleptiques et de tranquillisants et finalement d’accepter l’autre dans sa différence maîtrisée. Ainsi une place plus visible a progressivement été accordée aux personnes en souffrance mentale.
Souvent spectaculaire et audacieuse, l’architecture hospitalière reflète l’engagement des hommes pour sauver et protéger l’humain. Cet élan salvateur s’est manifesté de façon très différente dans les soins psychiatriques qui furent longtemps tenus à l’écart du monde. Les progrès médicaux aidants, il a été possible de maîtriser les symptômes à l’aide de neuroleptiques et de tranquillisants et finalement d’accepter l’autre dans sa différence maîtrisée. Ainsi une place plus visible a progressivement été accordée aux personnes en souffrance mentale.
L’évolution architecturale des hôpitaux psychiatriques témoigne du changement de regard de la société envers les « insensés ». Un ouvrage raconte le cheminement vers la réinsertion de ces patients et de leur lieu de soins : « Architecture pour la psychiatrie de demain ». Ce livre fait œuvre de pédagogie en interrogeant notre rapport à la maladie mentale à travers une lecture symbolique de l’architecture psychiatrique du XIXème siècle à nos jours. « L’enjeu est aujourd’hui de concilier le soin et la réinsertion, de considérer les besoins de la personne et sa qualité de citoyen à part entière » annonce Yann Bubien, directeur général du CHU d’Angers en introduction. Et chacun peut se sentir concerné directement ou par ses proches car les statistiques sont là : 2 millions de patients sont suivis en ambulatoire, 415 000 sont hospitalisés dans l’un des 635 établissements psychiatriques
L’histoire de l’architecture psychiatrique est celle du lent écroulement des murs asilaires remplacés par des établissements, ouverts sur la cité, déstigmatisant la maladie mentale, la banalisant en appartement thérapeutique, en hôpital de jour et en accompagnement social.
L’ouvrage collectif convie une vingtaine d’auteurs à témoigner : homme politique, historien, médecins, psychiatres, architectes, ingénieurs, directeurs d’établissement, soignants, juristes. « Si les murs ne soignent pas reconnait le psychiatre Vincent Camus, ils peuvent cependant apaiser, rassurer, encadrer et soutenir ». Et le spécialiste propose de parler d’espace d’accueil plutôt que de pavillon, de parcours de rétablissement plutôt que de parcours de soins.
Le sujet interpelle les élus. Il est intéressant de lire sous la plume de Denys Robillard rapporteur de la mission d’information sur le santé mentale et l’avenir de la psychiatrie que le sujet a inspiré nombre de rapports, pas moins de 15 entre 2000 et 2009 ce qui fait rajouter à l’auteur du rapport d’information N°1662 une savoureuse proposition 30bis à savoir de « diminuer le nombre de rapports et donner la priorité à la mise en œuvre des recommandations récurrentes. »
Richement illustré, le guide offre une fresque des sites les plus prestigieux et des problèmes soulevés par leur nécessaire restructuration, la Ville-Evrard, le Vinatier, Sainte-Anne… « Le questionnement n’est pas uniquement architectural. Une stratégie immobilière hospitalière est d’abord la traduction d’un projet médical et soignant qui anticipe les progrès de la médecine et s’inscrit dans une politique régionale de santé ». explique Zaynab Riet, l’ancienne directrice de l’EPSM Ville-Evrard. Cette stratégie doit aussi tenir compte des objectifs d’aménagement du territoire, des enjeux du développement durable et la nécessaire maîtrise économique. A la lecture de ces multiples contraintes parfois difficilement conciliables, on comprend la gageure de tout projet de modernisation d’un site élevé tardivement au rang de patrimoine.
La dernière partie est consacrée aux perspectives d’une psychiatrie en marche vers la désinstitutionnalisation. Selon Cécile Jaglin Gimonprez, déléguée du Groupement HUGO, la psychiatrie de demain est caractérisée par le développement de l’ambulatoire, le rapprochement de l’offre des bassins de populations, l’implication du patient et le renforcement du suivi chronique extra-hospitalier. Les professionnels parlent désormais de programmation pour des publics très ciblés, les enfants, les personnes âgées, les jeunes adultes et pour des situations plus ou moins critiques, urgences, isolement, soins de suite. Il est même question d’une architecture hors les murs, « dans un environnement du quotidien » selon l’expression de l’architecte Jérôme Bataille… Signes marquant peut-être la fin d’une architecture classée « psychiatrique ».
Marie-Georges Fayn
Architecture pour la psychiatrie de demain
Sous la direction de Yann Bubien et Cécile Jaglin-Grimonprez
Penser l’architecture pour mieux soigner et insérer dans la cité
200 PAGES, 24 X 18 CM – ISBN 978-2-8109-0560-7 • 40 €