L’infertilité masculine est une préoccupation croissante dans les sociétés modernes. Parmi les différentes causes d’infertilités masculines, certaines ont une origine génétique. C’est le cas de la globozoospermie, caractérisée par la production de spermatozoïdes anormaux : la tête du spermatozoïde est ronde et dépourvue d’une structure particulière nécessaire à la fécondation, appelée acrosome.
L’acrosome est une vésicule géante de sécrétion ayant la forme d’un capuchon recouvrant l’extrémité apicale de la tête du spermatozoïde. L’acrosome contient des enzymes protéolytiques nécessaires à la traversée de la zone pellucide qui entoure et protège l’ovocyte. Sans acrosome, les spermatozoïdes ne peuvent donc pas féconder l’ovocyte. L’acrosome est fortement liée au noyau du spermatozoïde sur ses 2/3 antérieurs. Jusqu’à présent, le mécanisme permettant d’ancrer l’acrosome à la pointe du spermatozoïde restait obscur.
L’équipe « Génétique, Infertilité et Thérapeutiques » de Grenoble, co-dirigée par les Drs Christophe Arnoult et Pierre Ray du laboratoire AGIM CNRS FRE 3405 avait déjà démontré en 2011 qu’une délétion du gène DPY19L2, appartenant à une famille de protéines de fonction inconnue, était retrouvée chez plus de 75% des patients atteints de globozoospermie (1).
L’équipe a poursuivi ses travaux en étudiant des souris knock out (KO) dépourvues du gène Dpy19l2 qui reproduisent parfaitement le phénotype observé chez l’homme. Ce travail a permis de comprendre la fonction de cette protéine et vient d’être publiés dans la revue « development » (2). A partir de ce modèle, l’équipe a démontré que le gène DPY19L2 code pour une protéine transmembranaire impliquée dans l’ancrage de l’acrosome sur le noyau du spermatozoïde. En absence de cette protéine, l’acrosome en formation se positionne normalement mais ne peut résister aux forces permettant son positionnement autour du noyau, entraînant ainsi son détachement. Une fois détaché, l’acrosome anormal est éliminé lors de la phase de réduction cytoplasmique observée dans les étapes ultimes de la spermatogénèse. L’absence d’acrosome empêche aussi le positionnement de microtubules qui permettent l’allongement du noyau qui donne la forme caractéristique à la tête du spermatozoïde.
Spermatozoïde humain globozoocéphale (tête ronde en bleu) dépourvu d’acrosome | Spermatozoïdes murins en cours de formation (spermatides allongés) : la protéine Dpy19l2 (en vert) est à l’interface du noyau (en bleu) et de l’acrosome (en rouge) |
Ces travaux permettent de lever le voile sur la fonction de la famille des protéines DPY19 qui participeraient au contrôle de la position du noyau dans la cellule, base de nombreux mécanismes cellulaires comme la neurogénèse. De plus, la compréhension de la physiopathologie de cette infertilité permettra à terme d’améliorer la prise en charge de ces patients dont le traitement palliatif reste encore extrêmement difficile.
Références
(1) Harbuz, R., Zouari, R., Pierre, V., Ben Khelifa, M., Kharouf, M., Merdassi, G., Abada, F., Escoffier, J., Nikas, Y., Vialard, F., Koscinski, I., Triki, C., Sermondade, N., Schweitzer, T., Zhioua, A., Zhioua, F., Latrous, H., Halouani, L., Ouafi, M., Makni, M., Jouk, P. S., Sèle, B., Hennebicq, S., Satre, V., Viville, S., Arnoult, C., Lunardi, J., and Ray, P. F. (2011). A recurrent deletion of the DPY19L2 gene causes infertility in man by blocking sperm head elongation and acrosome formation. Am. J. Hum. Genet. 88(3):351-61.
(2) Pierre V., Martinez G, Coutton C, Delaroche J, Novella C, Pernet-Gallay K, Hennebicq S and Ray PF ; Arnoult C (2012) Dpy19l2 is required for anchoring the acrosome to the nucleus during spermiogenesis and its absence causes globozoospermia in mice. Development 139, 0000-0000 (2012) doi:10.1242/dev.077982. 4 July 2012
(Crédit photographique C Arnoult, CNRS)
Pierre Ray T 04767655 73 PRay@chu-grenoble.fr
Christophe Arnoult T 0476637402 christophe.arnoult@ujf-grenoble.frl
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