En ce mois de septembre, d'une grève à l'autre, au terme d'un été marqué par 5 suicides d'infirmiers, les soignants dénoncent le malaise d'une profession lors de journées de mobilisation. Côté finances, le déficit de la Sécurité sociale amorce une réduction en pente douce.
En ce mois de septembre, d’une grève à l’autre, au terme d’un été marqué par 5 suicides d’infirmiers, les soignants dénoncent le malaise d’une profession lors de journées de mobilisation. Côté finances, le déficit de la Sécurité sociale amorce une réduction en pente douce.
Le 14 septembre, c’est une profession en deuil qui répondait à l’appel à la grève de la Coordination nationale infirmière (CNI), l’un de ses principaux syndicats. L’ambiance était lourde ce jour-là aux abords de l’hôtel de ville de Martigues (13), rapporte le site Infirmiers.com. En marge de son Université d’été, qui se tenait dans cette localité, la CNI, organisait une manifestation pour sensibiliser le public sur le malaise soignant, bilan macabre à l’appui.
Le 13 juin à au CHU de Toulouse un infirmier se suicidait sur son lieu de travail, le cinquième de l’année au sein de cet établissement. Le 24 juin, c’est une infirmière de nuit du Groupe hospitalier du Havre qui mettait fin à ses jours, puis le 30 juin, un cadre de santé, tout juste diplômé. Le 23 juillet, une infirmière du service médical Interprofessionnel de la Région de Reims (SMIRR) s’est donné la mort, le 13 août l’une de ses collègues. « On a appelé à porter le brassard noir en solidarité vis à vis des familles des personnes qui se sont suicidées dernièrement, et pour exprimer la douleur qui monte dans les établissements », confiait alors Nathalie Depoire, la présidente du syndicat infirmier. Tous les personnels paramédicaux (kinés, aides-soignants ou encore auxiliaires de puériculture) étaient invités à se joindre au mouvement pour « des actions locales », insistait la CNI dans un communiqué, afin de dénoncer la dégradation des conditions de travail à l’hôpital.
Marisol Touraine a promis pour l’automne de nouvelles mesures contre les risques psycho-sociaux
Les soignants dénonçaient, du reste, dans Le Figaro (14 septembre) les « réponses très insatisfaisantes » de Marisol Touraine, la ministre de la Santé. Alors que face à la souffrance de « tous les personnels », victimes des « restructurations », d’un manque d’effectifs, et qui ont « de plus en plus l’impression de mal faire leur travail », la CNI réclame des « actions urgentes », expliquait à l’AFP son vice-président Eric Audouy. Critiquée pour son silence médiatique, la ministre avait toutefois reconnu le caractère « évidemment extrêmement préoccupant » de ces drames lors de son passage au Grand Jury RTL/LCI/Le Figaro, le 4 septembre, promettant pour l’automne de nouvelles mesures contre les risques psycho-sociaux à l’hôpital.
Après les soignant, les praticiens hospitaliers en grève : « la pénurie médicale fait de plus en plus de ravages »
Ajoutant à cette tension, le 26 septembre, c’était au tour des praticiens hospitaliers d’entamer un mouvement de grève. Lassés d’attendre le plan attractivité des carrières médicales, ils répondent à l’appel du SNPHAR-E, soutenu par Avenir Hospitalier et une dizaine d’autres syndicats. « La pénurie médicale fait de plus en plus de ravages. On constate entre 26 et 30% de vacance sur les postes de PH, relevait le Dr Yves Rébufat, président du SNPHAR-E dans Le Quotidien du Médecin du 26 septembre. En anesthésie, spécialité très perturbée par une démographie chancelante, dimensionner l’équipe médicale est un enjeu majeur. Or, sans mesure du temps de travail, la taille de l’équipe est définie sans objectivité, au doigt mouillé ou selon le charisme du chef de service dans l’hôpital. Les urgentistes ont obtenu fin 2014 un nouveau décompte de leur temps de travail. Toutes les spécialités doivent pouvoir accéder à ce type d’organisation ».
Quant à l’élan de ce mouvement, Action Praticiens hôpital (qui réunit Avenir hospitalier et la CPH) a demandé aux médecins grévistes de se signaler. « Chiffrer réellement le nombre de PH grévistes est toujours délicat, devoir de réserve oblige, remarque le Dr Max-André Doppia, président d’Avenir Hospitalier, dans la même édition du Quotidien du Médecin. Mais de préciser « Les témoignages montrent en tout cas que le malaise à l’hôpital touche toutes les spécialités médicales, tous les âges et toutes les régions. Un président de commission médicale d’établissement nous a écrit qu’il avait l’intention de mobiliser les 30 PH de son hôpital. Un autre service de huit PH sera 100 % gréviste. Une autre médecin en congés nous a demandé comment être reconnue gréviste. Même un PU-PH nous a écrit! »
Une seconde journée de mobilisation est prévue le 12 octobre, relayée par les cinq intersyndicales de PH (Avenir hospitalier, CPH, CMH, INPH et SNAM-HP).
Alors que se dessine la perspective de voir disparaître le « trou de la Sécu »
« En 2017, le » trou de la Sécu » aura disparu. Le régime général, qui affichait 17,4 milliards de déficit en 2011, sera à 400 millions de l’équilibre. Pour un budget de 500 milliards, c’est l’épaisseur du trait », déclarait le 22 septembre, Marisol Touraine au quotidien Les Echos. Avec à la clé une liste d’économies pour atteindre cet objectif visé par le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS)
Mais la ministre ne parle là que du régime général -qui comprend maladie, retraites, famille et accidents du travail, remarque l’Express. Si l’on y ajoute le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) -une autre composante de la Sécurité sociale chargée de verser les cotisations retraites des chômeurs et le minimum vieillesse, le déficit doit atteindre les 4,2 milliards d’euros l’an prochain. « Il y a tout de même fort à parier que le déficit sera presque nul l’année prochaine, indique Henri Sterdyniak, économiste à l’OFCE, dans le même magazine. Même si l’on prend en compte l’ensemble des régimes, le diagnostic global est plutôt positif. »
Pour parvenir à une réduction aussi spectaculaire, « le gouvernement va inscrire dans le prochain PLFSS un montant sans précédent depuis 2012 », précise Le Monde. De fait, de 3,4 milliards en 2016, il va en être demander quatre en 2017. « Les hôpitaux seront mis à rude épreuve avec une économie globale de 1,5 milliard d’euros, souligne le Quotidien du Médecin. Les groupements hospitaliers de territoire (GHT) font espérer au gouvernement 505 millions d’euros sur l’optimisation des achats ». Et d’ajouter qu’un nouvel effort est également réclamé sur la prescription de médicaments (260 millions), la montée en charge de la chirurgie ambulatoire (160 millions) et la réduction des » inadéquations hospitalières » (250 millions).
Betty Mamane
Betty Mamane