Trois ans déjà que l’équipe de transplantation rénale du CHUGA rend possible l’impossible en travaillant sur cette innovation majeure permettant de rompre avec la fatalité de la non compatibilité des groupes sanguins entre donneur et receveur. En France, ces techniques ne sont en place que dans le tiers des centres de greffe rénale. La plus simple est celle qui consiste à s’affranchir de la barrière des groupes sanguins. En revanche la technique visant à s’affranchir des incompatibilités tissulaires (immunoadsorption) est beaucoup plus complexe et n’est disponible que dans quelques établissements dont le CHU Grenoble Alpes, 3e Centre le plus important en France pour les greffes de rein avec donneur vivant.
15 000 personnes en attente de greffe rénale
A ce jour, 80 000 personnes en France se trouvent en insuffisance rénale terminale, c’est-à-dire pour qui leurs reins ne fonctionnent plus. Pour vivre ils ont besoin d’un traitement de suppléance : ce peut être la dialyse (hémodialyse ou dialyse péritonéale) ou la greffe rénale. La qualité de vie des patients est bien meilleure quand ils sont greffés par rapport à ce qu’elle est en dialyse. Il y a environ 48 000 patients dialysés. Parmi ceux-ci 15 000 sont en attente de greffe rénale à partir de donneurs décédés. Mais chaque année il n’y aura qu’environ 3 500 greffes rénales ce qui ne cesse de faire progresser le délai d’attente médian pour une greffe. La seule façon de réduire le hiatus est de développer la greffe rénale à partir de donneurs vivants. En France, la loi de bioéthique permet à toute personne, y compris un ami, de donner de son vivant. Ainsi en 2015 15% des greffes rénales réalisées en France l’ont été à partir de donneurs vivants. Il faudrait que ce pourcentage soit de plus de 50% pour mieux répondre aux besoins.
Contourner les incompatibilités
Dans certains cas le donneur est incompatible avec le receveur: l’incompatibilité peut porter sur les groupes sanguins ou sur les groupes tissulaires. En France, en cas d’incompatibilité c’est-à-dire en présence d’anticorps potentiellement très dangereux pour le greffon, le donneur est récusé. Néanmoins depuis quelques années certaines équipes de greffe rénale ont mis en place des traitements pour contourner cette incompatibilité : il s’agit de la désimmunisation. Une technique complexe utilisée dans seulement un tiers des établissements de santé réalisant des greffes. En pratique, dans le mois qui précède la greffe le receveur va bénéficier de séances d’aphérèse permettant de « nettoyer » son sang des anticorps potentiellement dangereux et dirigés contre son donneur en association à des immunosuppresseurs (« anti-rejet ») pour empêcher que ces anticorps ne réapparaissent. C’est grâce aux progrès récents des techniques d’aphérèse (immunoadsorption, double filtration plasmatique) que ces greffes incompatibles sont rendues possibles.
152 greffes rénales réalisées en 2017 au CHUGA
«Nous souhaitons dans un futur proche faire bénéficier de la technique d’’immunoadsorption à des patients en attente de greffe rénale quasiment "ingreffable" sur le plan immunologique, et qui n’ont pas de donneurs vivants. Cette technqiue permettrait de les rendre compatible avec un donneur décédé», expliquent d’une même voix le PrLionel Rostaing et le Dr Paolo Malvezzi, néphrologues au CHU Grenoble Alpes.
Grâce aux efforts conjugués des équipes de chirurgie urologique, d’anesthésie et réanimation et de néphrologie, le CHU Grenoble Alpes a réalisé 152 greffes rénales en 2017 dont une cinquantaine d’entre elles ont été faites à partir de donneurs vivants.