Créé en septembre 2007 par le professeur Olivier Rodat, le centre fédératif médico-légal du Chu de Nantes est un guichet unique destiné à recentrer toutes les activités de médecine légale.
La pratique d’autopsies et examens de corps, pour être l’activité la plus connue des médecins légistes, est cependant loin d’être la seule – même si les experts du CHU de Nantes l’assurent pour tout le département. Leur rôle s’étend en effet au constat et à l’évaluation de toutes formes de violences corporelles. Ils estiment la gravité des lésions et la durée de l’incapacité temporaire totale (ITT). Ils se chargent aussi des expertises pour la réparation de dommages corporels après une plainte au pénal ; D’autres types d’expertise sont encore plus particulières.
Ce sont eux par exemple qui déterminent si la pathologie ou le décès d’une personne est imputable ou non à l’amiante, si une contamination par le virus de l’hépatite C est consécutive à une transfusion… Leur expertise permet de quantifier les réparations dûes à la suite d’aléas thérapeutiques ou d’infections nosocomiales, ou encore aux conséquences de l’administration de distilbène dans les années 70.
Leur mission consiste également à examiner les réfugiés politiques afin de déterminer s’ils ont été victimes de tortures : « Nous en voyons de plus en plus de personnes demandant l’asile politique. Contrairement à ce que l’on pense parfois, ils n’en rajoutent pas sur ce qu’ils ont subi. Cela nous donne une vision de ce qui ce passe dans le monde, certes pas des plus réjouissantes », explique le Dr Renaud Clément, l’un des trois médecins légistes du CHU.
Les médecins légistes sont encore sollicités par les magistrats, notamment en tant qu’experts près la cour d’appel de Rennes, « parfois comme contre-experts en cas de conflit entre assurés et assureurs, par exemple ».
Toutes ces tâches impliquent différents services confrontés à toutes les situations de violence et maltraitance : l’unité d’accueil des enfants en danger en pédiatrie, le laboratoire de toxicologie qui outre les prélèvements examinées pour crime ou délit, a un rôle pivot dans le dépistage de l’alcool, des produits stupéfiants et sédatifs en matière de réglementation de la circulation routière , le service de victimologie pour les conséquences psychologiques des violences, le centre d’accueil des victimes d’abus sexuels en gynécologie. Leur regroupement en centre fédératif permet à tous les interlocuteurs extérieurs (gendarmes, policiers, magistrats…) d’avoir accès à un numéro central. « Il ne nous manque qu’un service d’anatomo-pathologie pour compléter le dispositif », explique le Pr Olivier Rodat, directeur du centre fédératif médico-légal.
En tout, une dizaine de personnes (médecins légistes, toxicologue, pédiatres, pédopsychiatre, gynécologue, victimologue, psychologues) sont ainsi organisées depuis septembre 2007 pour prendre en charge les victimes de violences.
Comme le souligne le Dr Renaud Clément, « Tous sont des gens passionnés, nécessairement, car la tâche est très particulière. Nous sommes confrontés à la violence sous toutes ses formes. Il est important que les acteurs fonctionnent en résonnance, afin d’éviter d’ajouter aux souffrances des victimes. Pour les auditions d’enfants, par exemple, tous les acteurs sont présents pour éviter à la victime de répéter à plusieurs reprises ce qu’il a subi et ne pas aggraver son état. Il faut être très disponible, avoir l’esprit d’équipe pour faire vite et bien. Le plus difficile, à mon avis, est d’assister aux reconstitutions de crimes. Dans la pratique, c’est moins dur, parce qu’on est dans la technique, c’est ce qui nous sauve ! Malgré tout, c’est une mission intéressante et qui ouvre sur de nombreux domaines.»
La médecine légale au CHU de Nantes : depuis 1986
L’activité médico-légale du CHU de Nantes est apparue officiellement en 1986 lorsque la communauté hospitalo-universitaire a décidé de créer un poste de professeur des universités en médecine légale, avec charge au récipiendaire du poste d’organiser sur le Chu une activité médico-légale clinique inscrite dans le cadre du service public. L’activité s’est organisée peu à peu, avec la création d’un deuxième poste hospitalo-universitaire. La réfection des salles d’autopsie à la fin des années 90 a permis la création d’une salle spécifiquement dédiée aux activités médico-légales correspondant aux critères européens. Les différents services concernés ont peu à peu coordonné leur activité jusqu’à constituer le nouveau centre fédératif.