Rechercher
Fermer ce champ de recherche.

Modèle Hospitalo-Universitaire : 10 propositions pour des Assises historiques ?

Auteur /Etablissement :
Les présidents des trois Conférences CHU en décembre 2023. Crédit Photo : A. Morcuende
A l’occasion de la 18e édition des Assises Hospitalo-Universitaires, qui se sont tenues au Palais des Congrès de Versailles les 14 et 15 décembre, les présidents des trois conférences de CHU ont présenté dix propositions pour redonner du souffle à un modèle hospitalo-universitaire en perte de vitesse. S'ils veulent croire à une "relance historique", la balle est désormais dans le camp du ministère de la santé.

Profiter de l’exposition pour frapper un grand coup. C’est un peu l’esprit avec lequel le Pr Benoît Véber, président de la Conférence des doyens de médecine, Philippe El Saïr, président de la Conférence des directeurs généraux de CHU, et Rémi Salomon, président de la Conférence des présidents de CME de CHU ont présenté jeudi dernier une plateforme de solutions pour permettre l’hôpital de demain. Ou, si l’on préfère, sauver celui d’aujourd’hui.

L'objectif est de "relancer le modèle hospitalo-universitaire français, idéalement pour au moins une génération, dans un monde aux défis inédits."

C’est en effet lors d’une conférence de presse, qui s’est tenue en pleines assises Hospitalo-Universitaires, grand messe biennal des CHU permettant à ses représentants d’amorcer un certain nombre de réflexions, que les trois présidents ont tenu à « dresser un constat lucide et nuancé sur la situation du modèle hospitalo-universitaire en 2023« .  Sans alarmisme, l’état des lieux se veut donc réaliste. « Un certain nombre de signaux nous signifient que le modèle HU s’essouffle. Les temps ont changé. », a tout d’abord déclaré le Pr Benoît Véber, talonné par Philippe El Saïr, lequel marque le début de cet « essoufflement du modèle HU à partir des années 2000. » Et de poursuivre : « Le soin, l’enseignement et la recherche sont plus exigeants et plus dures à assumer. Le paradoxe, c’est que le CHU n’a jamais été aussi nécessaire. On ne peut pas penser l’accès au soin dans les territoires sans les CHU. Idem pour la formation des professionnels et le rebond de la France en recherche médicale. » 

Dix propositions communes

Après le diagnostic partagé, viennent des propositions « clés de réforme, délibérément peu nombreuses. » Ces solutions, qui répondent en effet au nombre de dix, se veulent ambitieuses, avec l’objectif de « relancer le modèle hospitalo-universitaire français, idéalement pour au moins une génération, dans un monde aux défis inédits. » Au verso du fascicule remis aux journalistes présents, on pouvait en effet lire, sous forme d’infographie, les dix propositions résumées : 

  1. Contractualiser au niveau du service, sur la durée de la carrière, l’exercice des trois missions
  2. Favoriser une formation au management et à la gestion de projets
  3. Rénover le statut CCU-AH (CCA)
  4. Ouvrir une concertation sur la modernisation et la revalorisation des statuts HU
  5. Créer 1000 postes HU titulaires sur 5 ans
  6. Permettre aux collectivités territoriales de financer des posts HU titulaires
  7. Décliner un modèle d’universitarisation des territoires 
  8. Créer une cohérence et une dynamique nouvelle par accord-cadre national et des contrats de site sur la recherche en santé
  9. Généraliser un intéressement par service à la croissance des crédits recherche
  10. Assouplir les conditions réglementaires d’entrée d’un CHU au capital d’une start-up
Le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, veut aller au-delà des "belles paroles". Crédit Photo : Adrien Morcuende

Parmi ces différentes propositions, dont on peut retrouver le détail sur le site de la Conférence des Doyens de médecine, trois points ont été particulièrement mis en avant durant la conférence de presse : « l’attractivité des CHU, la recherche biomédicale, l’ouverture du CHU et sa faculté aux territoires ». Outre la presse spécialisée présente, les premiers destinataires de cette réflexion étaient Aurélien Rousseau, ministre de la Santé et de la prévention, et de Sylvie Retailleau, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, venus le matin même participer à l’ouverture des 18e Assises Hospitalo-Universitaires. Et à écouter le locataire de Ségur, qui évoque « un alignement des planètes avec une dynamique hospitalo-universitaire et la volonté politique de redynamisation des CHU », les propositions qui lui sont faites sont « pertinentes » et « rejoignent les préoccupations » des pouvoirs publics. Devant une audience attentive, Aurélien Rousseau a assuré que « ce discours n’est pas l’expression de belles intentions », mais d’intentions tout court. 

Financement des valences enseignement et recherche des praticiens hospitaliers dans une intégration à des projets territoriaux, modernisation des statuts hospitalo-universitaires titulaires et non titulaires, sécurisation du statut de chef de clinique-assistant des hôpitaux (CCU-AH) etc. ont ainsi fait partie des sujets sur la table pour que les CHU puissent rester, dans les deux prochaines décennies, « les vaisseaux amiraux de la santé publique. «  Suffisant pour faire de ce 14 décembre 2023 une journée « historique », comme veulent le croire les 3 présidents des Conférences ? La balle est aujourd’hui du côté du gouvernement. Premiers éléments de réponse dans « quatre à six mois. » 

Des Assises en miroir 

Quant aux Assises, elles ont, une fois encore, reflété les sujets et maux qui traversent actuellement le monde hospitalo-universitaire. Deux ans après avoir s’être réunies à Lille autour du thème de l’incertitude (la crise du Covid était alors le sujet de préoccupation majeur), c’est bien le devenir du modèle prévalent depuis 1958 qui s’est retrouvé au coeur des discussions* ; avec, au milieu de tables rondes dédiées à la recherche biomédicale dans un monde hyper concurrentiel, à la démographie et aux besoins de santé d’ici 2040, à l’IA et au numérique en santé, une problématique qui joue les nerfs de la guerre depuis plusieurs années : l’attractivité du modèle HU. 

Une nouvelle fois, un certain nombre de pistes, notamment pour proposer un cadre de travail et d’évolutions à de jeunes/futurs professionnels dont la carrière n’est plus l’alpha et l’omega d’une vie, ont résonné dans l’enceinte du palais des congrès de Versailles. Doivent désormais s’imposer, rapidement et partout, des réalités de terrain. « Nous n’avons pas le temps d’attendre » , a déclaré le ministre de la santé**. Les CHU et l’hôpital public, leurs personnels et leurs patients, non plus. 

La rédaction 

 

* le replay des tables rondes des 18e Assises Hospitalo-Universitaires  sera prochainement disponible sur la chaîne YouTube de « Gestions Hospitalières

** Cet article a été écrit quelques jours avant la démission d’Aurélien Rousseau du gouvernement, suite au durcissement du projet de loi sur l’immigration. 

Sur le même sujet

Pour préserver sa fertilité, on lui déplace l’utérus au niveau du nombril

Dans le cadre de la prise en charge d’une patiente atteinte d’un sarcome d’Ewing au niveau de la cloison recto-vaginale, le Pr Cherif Akladios, chef du pôle de gynécologie, obstétrique et fertilité aux Hôpitaux Universitaires de Strasbourg, a réalisé un geste spectaculaire et inédit en France. En déplaçant son utérus au niveau de son ombilic, le chirurgien et son équipe ont sans doute permis à la jeune femme de préserver sa fertilité.

« Développer la chirurgie robotique, c’est faire face à beaucoup d’embûches »

A l’occasion d’une série de reportages au CHU de Nice, nous avons suivi le Pr Matthieu Durand, chef du service d’urologie, andrologie et transplantation rénale. Ce dernier a accepté de partager sa vision sur le développement de la chirurgie robotique au bloc opératoire. Dans son service, une attention particulière est donnée à l’enseignement avec 100% d’internes formés à la robotique. Un entretien au carrefour de la formation et de l’innovation.

Dossier : le diabète

Le 14 novembre était la journée mondiale du diabète. Une maladie répandue mais complexe. Environ 537 millions d’adultes vivent avec le diabète dans le monde. En France en 2020, plus de 4,2 millions de personnes vivent avec un diabète, soit 6,1 % de la population. Le diabète est plus fréquent chez les hommes que chez les femmes, à l’exception des territoires ultra-marins où les femmes sont les plus touchées.

Face à l’explosion des demandes de PMA, les CECOS dans l’inquiétude

Depuis la promulgation de la loi de bioéthique il y trois ans, les demandes d’aide à la procréation médicalisée ont explosé. En face de cette dynamique, le nombre de donneurs de spermatozoïdes, lui, est en baisse. Un constat aussi valable pour le don d’ovocytes et qui inquiète les professionnels des Centres d’études et de conservation des œufs et du sperme humain. Ces derniers n’ont que quelques mois pour reconstituer leurs banques de gamètes, désormais régies par la levée de l’anonymat des donneurs. Reportage au CHRU de Tours.