A l’heure des départs en vacances, les résultats d’une étude menée à Bordeaux peuvent aider les automobilistes qui s’apprêtent à effectuer un long trajet.
L’endormissement au volant est responsable de 20% des accidents de la route dans les pays industrialisés. Un risque d’accident multiplié par 5,6 lorsqu’on conduit entre 2 et 5 heures du matin, affirme une enquête anglo-saxonne. Comment éviter les effets néfastes de la fatigue sur l’automobiliste ? Des études réalisées en simulateur de conduite avaient déjà montré que le café et une pause de sommeil étaient efficaces face aux baisses d’attention et à l’endormissement.
Le Pr Pierre Philip du CHU de Bordeaux et son équipe du laboratoire de physiologie et physiopathologie cellulaire du CNRS dirigée par le Pr Bernard Bioulac ont évalué l’impact de ces contre-mesures en situation réelle. 12 volontaires, de 18 ans à 25 ans, ont effectué 4 épreuves de conduite de 200 kms. Un trajet de référence entre 17h et 18h30, puis les 3 trajets entre 2h et 3h30 du matin : l’un après avoir absorbé du café décaféiné (placebo), le deuxième après un bol de café instantané (200 mg de caféine) et le troisième après une sieste de 30 mn dans une voiture garée sur une aire de stationnement.
Après l’absorption de café, 75 % des conducteurs ont eu un comportement au volant similaire à celui qu’ils avaient eu lors de l’épreuve de conduite à 17h (un franchissement de ligne blanche au maximum). C’était également le cas de 66 % des conducteurs après une sieste de 30 mn avant de prendre le volant. En revanche, seulement 13% des conducteurs sous placebo avaient une conduite normale, certains allant jusqu’à 17 franchissements en 90 minutes de conduite.
Comment expliquer les différences d’efficacité supérieure de la caféine par rapport à la sieste ?
Ces différences s’expliquent par des modes d’actions distincts. L’envie de dormir au milieu de la nuit résulte d’une pression dite « homéostatique », visant à contrebalancer la durée d’éveil et d’une pression chronobiologique liée à l’horloge biologique qui agit indépendamment de la durée de veille. La sieste diminue la pression homéostatique, mais pas nécessairement la pression chronobiologique.
La caféine, qui stimule le système d’éveil, agit sur les deux et pourrait ainsi mieux permettre le retour à des performances normales.
Tout le monde n’est pas égal face à la privation de sommeil et face aux contre-mesures. Certains individus répondent bien à la caféine et d’autres à la sieste. Le travail de l’équipe du Pr Philip pourrait déboucher sur des recommandations individuelles face à la prise de risque que constitue la conduite nocturne. D’autres champs d’investigation en conditions réelles sont ouverts concernant les cas des conducteurs souffrant d’apnées du sommeil et sur l’évaluation des effets indésirables des médicaments.