Débats, consultations, réflexions ont ponctué ce mois de janvier autour des questions de bioéthique, du remboursement de la télémédecine et du rôle des CHU dans la recherche et l’enseignement. Alors que la DGOS livre son dernier état des lieux des chiffres de l’offre de soins…
Le remboursement de la télémédecine
Quels remboursements pour quels actes de télémédecine ? Après plusieurs années d’expérimentations locales, le gouvernement a décidé d’ajouter la télémédecine à la liste des actes remboursés par la Sécurité sociale au niveau national. Pour y parvenir, une négociation est organisée entre les cinq syndicats représentatifs des médecins libéraux (Confédération des syndicats de médecins français (CSMF), la fédération des médecins de France (FMF), le syndicat des médecins libéraux (SML), la Fédération française des médecins généralistes (MG France) et la Caisse nationale d’Assurance-maladie des travailleurs salariés (CNAMTS). Un événement largement suivi par les grands médias et par l’ensemble des médias Santé.
"Négociations sur la télémédecine, c’est parti", titre ainsi Le Quotidien du Médecin, livrant les retours de la première séance de négociations autour des ALD et des déserts médicaux.
"Nicolas Revel a annoncé se donner 3 mois pour finaliser ces négociations. Les participants ne partiront de toute façon pas d’une feuille blanche, puisque le développement de la télémédecine dans les maisons de retraite (Ehpad) a fait l’objet d’un avenant à la convention médicale début 2017", rappellent de leur côté l’AFP et France Info…
Le lancement des Etats généraux de la bioéthique
Fin de vie, procréation, dons d’organes, génome, neurosciences… Ces sujets sont au cœur des débats des Etats généraux de la bioéthique lancés ce 18 janvier pour six mois et qui donneront matière à réflexion à la révision de la loi de bioéthique fin 2018. Des débats qui n’ont pas vocation à être des débats d’experts et sont ouverts à tous les citoyens comme le précise sur le site dédié à cette consultation publique le Pr Jean-François Delfraissy, président du Comité consultatif national d’Ethique (CCNE).
La mise en oeuvre de cette vaste concertation, déclinée dans toutes régions, a été largement annoncée dans la presse donnant notamment la parole aux milieux associatifs et autres acteurs engagés. A l’instar de la sociologue Irène Théry qui, dans une tribune cosignée dans Le Monde demandait l’ouverture d’un débat sur la GPA (gestation pour autrui). Question à laquelle le Pr Jean-François Delfraissy a plus largement répondu dans La Croix en assurant que "tous les sujets seront débattus".
Rôle des CHU dans l’enseignement et la recherche médicale
L’actualité santé a connu un temps fort avec la publication du rapport de la Cour des comptes* sur "Le rôle des CHU dans l’enseignement supérieur et la recherche médicale", ce 18 janvier. En synthèse il est écrit que « 60 ans après leur création, l’organisation hospitalo-universitaire a atteint ses objectifs de soins de haut niveau, de développement de la recherche et de professionnalisation de la formation des médecins. Pour autant ces deux derniers domaines montrent un essoufflement du modèle, dans un contexte en forte évolution. » Le constat des magistrats de la rue Cambon porte sur le repli de la recherche, la fragmentation des appels à projets, l’hétérogénéité des situations. Ils avancent également plusieurs propositions dont le fait de favoriser 5 à 10 CHU …. Un point qui a fait couler beaucoup d’encre.
La presse santé s’est saisie de ce document et a relayé les signaux inquiétants « les CHU apparaissent fragilisés sur de nombreux points » écrit Pia Hémery dans Hospimedia du 18/01. Les menaces sont nombreuses : « l’érosion des financements alloués à la recherche biomédicale » faisait peser sur les CHU, le manque de coopération au niveau de la double tutelle du domaine hospitalo-universitaire (ministères de la Santé et de la Recherche), l’absence de vision consolidée de l’ensemble des moyens, l’échec du plan de programmation de la recherche en santé. Avec pour conséquence « des segments de recherche non financés : tels que la recherche translationnelle, les grandes cohortes, les grands essais multicentriques ou encore le transfert pour l’innovation. » précise Damien Colomb dans le Quotidien du Médecin du 18 janvier.
L’APM du 18 janvier insiste sur l’« exercice inégal » de la recherche et sur les « disparités entre établissements ». Ainsi l’AP-HP représente 26% du budget de l’ensemble des CHU et 29,3 % des financements des programmes hospitaliers de recherche clinique (PHRC). Les données recueillies font apparaître une montée en puissance de 40 établissements non CHU dans le domaine de la recherche qui se partagent avec eux les financements MERRI et de ce fait la part des CHU dans les scores SIGAPS diminue– exception faite pour l’AP-HP et les HCL. Autre cause avancée, la généralisation de la tarification à l’activité et les difficultés financières qui amène les CHU à concentrer leur attention et leurs moyens sur les soins au détriment de la recherche.
Gilles Noussembaum de Décision Santé retient « le repli de la France dans le domaine de la recherche médicale. Elle se classe désormais au huitième rang mondial. Et a récemment été doublée par les Pays-Bas et la Chine.»
Disparité des situations dans l’enseignement
L’hétérogénéité règne aussi dans l’enseignement avec pour conséquences des chances inégales d’accès aux études selon les régions et des taux d’encadrements pouvant varier de 1 pour 6 étudiants à 1 pour 15.
Quant aux « propositions pour l’avenir », en matière d’enseignement, la Cour préconise de mieux associer les autres acteurs de la santé (médecins libéraux, centres hospitaliers, GHT) aux parcours de formation des étudiants dans un cadre piloté conjointement par l’université et le CHU. Elle recommande de s’appuyer sur les Groupements Hospitaliers de Territoire (GHT), « en vue de définir des parcours de formation cohérents avec les parcours de soins ». Sujet crucial, l’attribution des postes hospitalo-universitaires doit davantage prendre en compte les disparités nationales et l’évolution des disciplines.
Mais la proposition la plus commentée concerne la recherche. La Cour des comptes propose de désigner des têtes de réseau : cinq à dix CHU implantés au sein de métropoles régionales et bénéficiant d’une visibilité internationale suffisante et qui devraient remplir des objectifs de coopération et de soutien des établissements partenaires. « Cinq à dix CHU stars » résume Jonathan Herchkovitch pour What’s up doc. La Cour des comptes préconise de concentrer les MERRI sur ces CHU identifiés comme les plus actifs en recherche.
Cette proposition n’a pas manqué de faire réagir les CHU lors de leurs séances de vœux. Ainsi Charles Guépratte, directeur général du CHU de Nice a déclaré que "Le déclassement n’est pas une option" et qu’une "politique d’alliance et de valorisation de la recherche sera menée avec l’Université Côte d’Azur, le CNRS et l’INSERM".
Marie-Noëlle Gérain Breuzard, directrice générale du CHU de Tours veut conforter la compétitivité de cet établissement dans la recherche et les soins: " il est fondamental que Tours, unique CHU de la région Centre-Val de Loire, demeure dans la compétition et bénéficie du soutien de l’ensemble de notre région et de ses établissements. Il n’y a pas de région forte sans CHU fort"
« Le progrès médical connaît en effet une phase d’accélération, inédite mais sans doute appelée à durer et à entraîner de profondes répercussions. Il est, en grande partie, le fruit de la recherche médicale produite par les CHU, qui, en retour, bousculent les modalités de prise en charge de leurs patients, à un rythme toujours plus soutenu, comme l’illustrent les salles hybrides dans les blocs opératoires, les immunothérapies dans le traitement du cancer ou les nouvelles molécules contre l’hépatite C. Il bénéficie aussi des avancées rapides des autres disciplines (informatique, robotique, génomique, mathématiques, économie, droit). »** |
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*Ce rapport dédié à l’enseignement supérieur et la recherche médicale constitue la première étape d’une enquête sur les CHU qui sera complétée par une seconde étude sur leur rôle dans la gradation de l’offre de soins. Présenté en fin d’année ce travail viendra compléter la réflexion sur "le CHU de demain", menée actuellement par les six conférences des directeurs généraux et présidents de commission médicale d’établissement (CME) de CHU-CHR ; celles des doyens de faculté de médecine, de pharmacie et d’odontologie ; celle des présidents d’université, dans le cadre de la mission confiée par les ministres Agnès Buzynet et Frédérique Vidal
**p174 du rapport "le rôle des CHU dans l’enseignement supérieur et la recherche – Cour des comptes – janvier 2018
Les chiffres clés de l’offre de soins
Diffusée le 23 janvier par la Direction générale de l’offre de soins (DGOS), l’édition 2018 des chiffres clés dresse un panorama large mais précis de l’offre de soins en France, de ses professionnels, de ses composantes hospitalières et ambulatoires, de son activité, de son financement et de sa modernisation.Ce document de référence, accessible à tous, s’articule autour de 6 grandes thématiques: le secteur hospitalier, l’activité hospitalière, le secteur de ville, les professionnels de santé, le financement des établissements de santé, l’accès aux soins, la modernisation et l’innovation. Un état des lieux précieux pour les professionnels de santé mais aussi pour les médias (cf Infirmiers.com) et le grand public.
Marie-Georges Fayn & Betty Mamane
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