Familiariser les généralistes et spécialistes de ville au robot chirurgical, expliquer au public les avantages de cette technique mini-invasive de pointe, lever les craintes des futurs opérés… Tels sont les enjeux de la journée du 8 septembre 2010 au cours de laquelle les équipes du CHRU commenteront les multiples usages du robot assistant en chirurgie viscérale, ORL, gynécologique, urologique et pédiatrique. Des exercices pratiques seront proposés aux praticiens ! Lire les explications expertes des Dr Caroline Mor-Martinez (chirurgien viscéral), Sylvain Morinière (ORL), Olivier Acker (gynécologue), Franck Bruyère (urologue) et du Professeur Hubert Lardy (chirurgien pédiatre)…
La chirurgie transorale robotisée en ORL et Chirurgie Cervico-Faciale
Le robot chirurgical est une avancée technologique qui permet d’opérer les tumeurs du pharynx en passant par la cavité buccale. Une optique grossissante (jusqu’à 20 fois), en 3D permet d’exposer les régions profondes de la gorge. Deux bras portant des instruments de petites tailles (5mm), extrêmement précis et mobiles dans toutes les directions de l’espace, permettent d’opérer dans la gorge. Ils sont guidés à distance par le chirurgien qui opère dans une console à côté du patient. Un deuxième chirurgien est lui à la tête du patient pour aider (aspiration, écartement des tissus).
On évite ainsi une grande ouverture cervicale et faciale qui est habituellement indispensable dans la chirurgie « ouverte » classique.
Après une formation spécifique, l’équipe chirurgicale ORL de Tours a été la première à débuter cette chirurgie robotique trans-orale en France pour le traitement d’une tumeur bénigne de la base de la langue en octobre 2008. Depuis 7 autres centres (Lille, Lyon, Paris, Nîmes, Toulouse, Nancy, Limoges) ont aussi commencé cette activité.
A Tours, depuis 18 mois, 16 patients ont déjà été traités par cette innovation technologique dont 13 tumeurs cancéreuses du pharynx. Le robot a permis d’éviter une voie d’abord large cervicale, une trachéotomie provisoire et une alimentation par sonde nasogastrique pour la majorité des patients. La durée d’hospitalisation a été plus courte (7 à 10 j) qu’en chirurgie classique (15 à 20 j).
Cependant, cette chirurgie trans-orale robotique n’est réalisable que dans certains cas sélectionnés. Elle reste une chirurgie difficile avec la possibilité à tout moment de convertir l’intervention en chirurgie classique. Les résultats sur le plan fonctionnel, carcinologique et médico-économique sont en cours d’évaluation dans le cadre d’une étude multi-centrique nationale impliquant les principaux centres qui ont débuté cette chirurgie.
Docteur Sylvain Morinière
Le robot dans le service de chirurgie viscérale
L’activité de chirurgie digestive robot assistée au CHRU de Tours compte à ce jour 17 interventions. Les premières procédures ont été réalisées par l’équipe dédiée à la chirurgie de l’obésité. Depuis 2008, 7 interventions de Nissen robot-assistées ont été effectuées. Les suites opératoires ont été simples. 4 promontofixations ont été programmées en procédure robot assistée, Une cholécystectomie par coelioscopie a été programmée en 2009. Depuis début 2010, deux chirurgiens supplémentaires ont reçu la formation à la chirurgie robot-assistée. Ils ont pratiqué 5 interventions : 1 hernie inguinale bilatérale, 1 colectomie simoidienne, 3 procédures d’exérèse du rectum. A ce jour, 1 conversion en laparotomie a été nécessaire pendant une procédure rectale, après une conversion en coelioscopie conventionnelle. Cette conversion ne semble pas liée au robot.
Perspectives d’avenir : Développement de la chirurgie de l’obésité avec la réalisation du gastric by pass robot assisté avec pour but l’amélioration de la qualité de l’anastomose gastrojéjunale manuelle.
Développement de la chirurgie colorectale pour une meilleure préservation nerveuse dans l’excision totale du mesorectum. La chirurgie d’exérèse du pancréas et de l’estomac sont 2 axes de développement possible en chirurgie digestive, les premières études publiées montrant la faisabilité de ces techniques. Une thèse de doctorat en médecine visant à étudier l’activité de chirurgie digestive robot assistée est en cours.
Docteur Caroline Mor
Chirurgie robot assistée et interventions gynécologiques
Cette chirurgie très polyvalente peut être proposée, à l’instar de la chirurgie coelioscopique conventionnelle, dans de nombreux cas de figures (endométriose, cure de prolapsus, cancer utérin ou du col de l’utérus, …) La coelioscopie est une intervention de l’abdomen réalisée à l’aide d’instruments miniaturisés sous contrôle vidéoscopique. L’abdomen doit être alors préalablement gonflé d’air et les instruments sont introduits par des orifices de petite taille pratiqués par l’opérateur. Celui-ci opère en regardant la zone opératoire dans l’écran qui lui fait face. Les instruments utilisés ne permettent de n’utiliser qu’une partie de la mobilité des mains. L’utilisation du robot chirurgical constitue une avancée majeure pour ce type d’intervention. En effet, il s’agit dans ce cas de réaliser une coelioscopie en y ajoutant : une vue de la zone opératoire en 3 dimensions, contrairement à une coelioscopie conventionnelle. Ceci permet l’immersion, mais aussi l’orientation et l’agrandissement au sein du champ opératoire. L’assistance informatique à l’intervention, qui consiste à reproduire précisément, et dans tous les plans de l’espace, les gestes des mains de l’opérateur. L’intervention n’est pas automatisée et tous les actes réalisés sont ceux de l’opérateur. Les patientes bénéficient de l’ensemble des avantages apportés par la chirurgie coelioscopique, que sont les pertes sanguines minimisées ainsi que des temps d’hospitalisations et une immobilisation raccourcis auxquelles s’ajoute l’amélioration de la précision et de la qualité de la chirurgie.
Docteur Olivier Acker
Qu’en est il en urologie ?
Dans le monde entier le nombre de robot ne cesse d’augmenter dans les blocs opératoires. C’est l’urologie avec en tête l’ablation de la prostate pour cancer qui est la spécialité la plus concernée. 100% des établissements qui ont à disposition le robot chirurgical réalisent les prostatectomies radicales avec le robot, ceci confirme sa supériorité aux techniques jusqu’alors employées. Hélas le produit est coûteux et tous les centres n’ont pas pu investir au détriment potentiel de milliers de malades qui auraient pu y accéder car actuellement environ 34 centres sont pourvus dans tout l’hexagone. Il n’y a pas que la prostatectomie radicale qui peut être réalisée avec cet appareil mais toutes les interventions réalisées jusqu’alors en coelioscopie traditionnelle. A Bretonneau nous avons décidé de ne faire que les interventions qui peuvent apporter un bénéfice pour le malade afin de ne pas dépenser inutilement pour des interventions bien réglées en chirurgie coelioscopique conventionnelle. Ainsi nous réalisons les cures de jonctions pyélo-urétérales (malformation du rein qui entraîne progressivement sa destruction), les cystectomies (ablation de la vessie pour cancer), les néphrectomies partielles (ablation d’une partie du rein pour petite tumeur), les dons de rein pour transplantation, certaines cures difficiles de descente d’organe et bien sur les prostatectomies pour cancer. Tout cela a un coût qui est pris en charge par l’établissement qui en contrepartie a vu sa notoriété grandir, son service d’urologie se développer, ses malades sortir plus tôt avec des suites plus simples. Quant à l’ablation de la prostate pour cancer les 3 objectifs étaient d’améliorer les résultats sur le pronostic du cancer avec de moindres fuites urinaires et une amélioration des chances d’érection. Les buts sont atteints puisque l’analyse des 150 premiers malades réalisés montre une diminution de la durée d’hospitalisation, une continence retrouvée plus rapidement et un meilleur taux d’érection.
Dr Franck Bruyère
La chirurgie robotique en pédiatrie
La chirurgie robot-assistée est une modalité émergente en chirurgie mini-invasive chez l’enfant. Certains actes techniques très précis dans des localisations anatomiques difficiles limitent en effet le recours à la coeliochirurgie classique. L’assistance du robot chirurgical permet en magnifiant l’image et en offrant au chirurgien une vision tridimensionnelle du champ opératoire, de réaliser des gestes de dissection ou de suture fine dans des espaces confinés où l’ergonomie coelioscopique est potentiellement difficile. Les indications sont soit urologique (cure chirurgicale des anomalies congénitales des reins ou des voies excrétrices, certaines tumeurs du rein ou des surrénales), soit digestive (malformations de la voie biliaire, chirurgie du reflux gastro-oesophagien, malformations anorectales). En chirurgie thoracique chez l’enfant, les explorations sont limitées par la taille des espaces intercostaux mais il existe une instrumentation de 5 mm rendant possible l’utilisation du robot dans la cavité thoracique pour le traitement de certaines tumeurs ou le traitement de malformations congénitales du poumon ou du médiastin. Ce vaste champ d’application de la chirurgie robotique montre à quel point cette technologie est en voie de développement. Il s’agit d’une technologie dont l’utilisation doit être raisonnée et évaluée scientifiquement afin de réellement quantifier les intérêts potentiels chez l’enfant.
Professeur Hubert Lardy