C’est sur son compte X (ex-Twitter) que Michael Duruisseaux, oncopneumologue et vice-directeur de l’Institut de cancérologie aux Hospices Civils de Lyon, a rendu public le 8 septembre dernier ce qui s’apparente à une véritable prouesse dans l’univers des essais cliniques pharmaceutiques. Dans un tweet contenant données et graphique, est en effet présentée la prédiction de résultats d’un essai clinique sur un traitement pour le cancer du poumon (essai FLAURA2 de phase III d’AstraZeneca). Des résultats qui se sont révélés justes et qui ont été officiellement annoncés lors de la Conférence Mondiale sur le Cancer du Poumon, soit trois jours après le post du Dr Duruisseaux !
Les Hospices Civils affirment que ni eux ni la biotech Novasdiscovery, partenaire du CHU lyonnais sur cette prédiction, n’ont pas reçu « d’informations confidentielles d’AstraZeneca » et « n’ont collaboré en aucune manière avec la société pour cette simulation. » Mais alors, comment cette petite révolution a-t-elle été possible ? Le principe réside dans la conversion de l’ensemble des connaissances sur le cancer du poumon en équations. A ensuite été généré un modèle de cette maladie (dit de pharmacologie des systèmes) ainsi qu’une population de cinq mille patients numériques ou “virtuels”, afin de tester toute une série d’hypothèses.
« Ces prédictions prospectives, totalement indépendantes et en aveugle, marquent un tournant pour la conception des essais cliniques. Pour cette simulation, nous aurions pu examiner potentiellement n’importe quel essai de phase III en utilisant la plateforme jinkō de Novasdiscovery. Cet effort de bonne fois démontre notre force technologique pour valider, étendre et accélérer les essais cliniques, ainsi que pour réduire les risques pour les participants et les coûts des essais cliniques.« , a déclaré François-Henri Boissel, Co-fondateur & PDG de Novadiscovery.
Un gain de temps spectaculaire et des risques en moins
Avec sa plateforme de simulation d’essai jinkō qu’elle fournit depuis 2022 aux entreprises biotechnologiques et pharmaceutiques, centres de recherche universitaires et hôpitaux universitaires, Novadiscovery a fait entrer l’IA dans les essais cliniques de manière spectaculaire. Le gain de temps, lui, est tout simplement énorme. Car là où l’essai d’AstraZeneca a été déployé sur trois années, la simulation a nécessité en tout et pour tout un mois de travail, pour un résultat identique. Quand on sait que certains traitements demandent des années, voire des décennies de développement, cette première marque peut-être un changement de paradigme dans la conception des essais cliniques pharmaceutiques.
« Les travaux de simulation de cet essai de phase III ont révélé le potentiel des essais cliniques in silico pour redessiner le développement des médicaments. Des résultats comme ceux-ci, s’ils sont exploités avant le début des essais chez l’homme, permettront de recruter la population de patients la plus pertinente, d’optimiser la conception des essais et, en fin de compte, d’accélérer tout le développement thérapeutique dans notre espoir commun que le cancer devienne une maladie curable ou en tout cas traitée beaucoup plus efficacement« , poursuit Michaël Duruisseaux.
Si l’IA offre la possibilité, grâce à des “bataillons” de patients numériques, d’être appliquée (y compris à d’autres maladies) en prenant moins de risques pour la santé humaine, cela ne signifie pas pour autant la fin des essais pharmaceutiques sur l’homme, qui restent indispensables.
La rédaction avec les Hospices Civils de Lyon