Daniel Moinard a dirigé les CHU de Poitiers (1992-1998), de Toulouse (1998-2007) et les Hospices Civils de Lyon (2011-2012). A la demande du Ministère de la Santé, il a également dirigé par intérim les CHU de Nantes en 2008, Caen en 2009 et Montpellier en 2010. Expert de la fonction et président de la société française d'histoire des hôpitaux, il revient pour Réseau CHU sur les conditions de l’accession à ces postes de haute responsabilité.
Daniel Moinard a dirigé les CHU de Poitiers (1992-1998), de Toulouse (1998-2007) et les Hospices Civils de Lyon (2011-2012). A la demande du Ministère de la Santé, il a également dirigé par intérim les CHU de Nantes en 2008, Caen en 2009 et Montpellier en 2010. Expert de la fonction et président de la société française d’histoire des hôpitaux, il revient pour Réseau CHU sur les conditions de l’accession à ces postes de haute responsabilité.
En pratique, quels sont les différentes étapes qui précèdent la nomination d’un Directeur général (DG) de CHU ?
La personne qui postule à un poste de DG de CHU doit adresser une lettre de motivation, ainsi qu’un curriculum vitae au ministère en charge de la Santé et à celui de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Elle sera auditionnée au niveau des cabinets ministériels qui recueilleront plusieurs avis : DG de l’Agence régionale de santé (ARS), Président du conseil de surveillance qui est souvent le Maire de la ville siège du CHU, Direction générale de l’offre de soins (DGOS)… Le candidat a aussi un échange avec le Président de la CME et le Doyen qui sont les partenaires privilégiés du DG.
C’est le Président de la République qui signe le décret de nomination sur la proposition des deux ministères. La nomination par décret étant discrétionnaire, le DG d’un CHU n’est pas nécessairement issu de la fonction publique hospitalière, ni ancien élève de l’EHESP.
La personne qui postule à un poste de DG de CHU doit adresser une lettre de motivation, ainsi qu’un curriculum vitae au ministère en charge de la Santé et à celui de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Elle sera auditionnée au niveau des cabinets ministériels qui recueilleront plusieurs avis : DG de l’Agence régionale de santé (ARS), Président du conseil de surveillance qui est souvent le Maire de la ville siège du CHU, Direction générale de l’offre de soins (DGOS)… Le candidat a aussi un échange avec le Président de la CME et le Doyen qui sont les partenaires privilégiés du DG.
C’est le Président de la République qui signe le décret de nomination sur la proposition des deux ministères. La nomination par décret étant discrétionnaire, le DG d’un CHU n’est pas nécessairement issu de la fonction publique hospitalière, ni ancien élève de l’EHESP.
Pouvez-vous nous rappeler les grandes étapes de la nomination des directeurs généraux de CHU ?
L’évolution des procédures de nomination des directeurs d’établissements est liée aux différentes transformations de l’hôpital. Jusqu’à la Révolution, l’hôpital est un établissement de charité, placé sous l’autorité de l’évêque et géré par des congrégations religieuses ; il passe ensuite sous mandat municipal avec toujours la même vocation d’accueil des malades indigents. Dans cette configuration, le maire nomme un directeur qui est à l’hôpital ce que le secrétaire de mairie est à la commune ; il y a aussi un économe pour la gestion des biens et denrées. C’est à partir de 1945 que tout change avec la création de la sécurité sociale et d’un nouveau service public : le service public hospitalier assuré par l’hôpital qui s’ouvre à toutes les catégories de la population. C’est l’Etat qui en assurera la tutelle et nommera les directeurs après concours national. S’agissant du CHU, il est créé par ordonnance en décembre 1958 ; c’est une réforme fondamentale incarnée par le professeur Robert Debré ; elle marie l’hôpital et la faculté de médecine et confère trois missions à cette nouvelle institution : le soin, l’enseignement et la recherche ; elle crée un corps d’élite médical, les praticiens hospitalo-universitaires exerçant à plein temps. Les médecins, les soignants, les malades entrent en masse dans les hôpitaux, tout particulièrement dans les CHU où les progrès de la médecine sont fulgurants. L’importance que prend l’hôpital nécessite alors une réforme de sa gouvernance. En 1960, l’Ecole nationale de la santé publique (ENSP) est créée par décret pour former les directeurs d’établissement hospitaliers sur concours national après un cursus universitaire. Les directeurs généraux de CHU sont nommés par arrêté du ministre de la Santé. Enfin, depuis la loi HPST en 2009 (1), les DG de CHU sont nommés par décret du Président de la République après avis des ministres de l’Enseignement supérieur et de la recherche et de la Santé. La fonction de DG de CHU a été incontestablement valorisée en quelques décennies, la faisant entrer dans la haute fonction publique, avec toutes les conséquences induites : reconnaissance tant que la confiance existe mais éviction lorsque la défiance s’installe…
L’évolution des procédures de nomination des directeurs d’établissements est liée aux différentes transformations de l’hôpital. Jusqu’à la Révolution, l’hôpital est un établissement de charité, placé sous l’autorité de l’évêque et géré par des congrégations religieuses ; il passe ensuite sous mandat municipal avec toujours la même vocation d’accueil des malades indigents. Dans cette configuration, le maire nomme un directeur qui est à l’hôpital ce que le secrétaire de mairie est à la commune ; il y a aussi un économe pour la gestion des biens et denrées. C’est à partir de 1945 que tout change avec la création de la sécurité sociale et d’un nouveau service public : le service public hospitalier assuré par l’hôpital qui s’ouvre à toutes les catégories de la population. C’est l’Etat qui en assurera la tutelle et nommera les directeurs après concours national. S’agissant du CHU, il est créé par ordonnance en décembre 1958 ; c’est une réforme fondamentale incarnée par le professeur Robert Debré ; elle marie l’hôpital et la faculté de médecine et confère trois missions à cette nouvelle institution : le soin, l’enseignement et la recherche ; elle crée un corps d’élite médical, les praticiens hospitalo-universitaires exerçant à plein temps. Les médecins, les soignants, les malades entrent en masse dans les hôpitaux, tout particulièrement dans les CHU où les progrès de la médecine sont fulgurants. L’importance que prend l’hôpital nécessite alors une réforme de sa gouvernance. En 1960, l’Ecole nationale de la santé publique (ENSP) est créée par décret pour former les directeurs d’établissement hospitaliers sur concours national après un cursus universitaire. Les directeurs généraux de CHU sont nommés par arrêté du ministre de la Santé. Enfin, depuis la loi HPST en 2009 (1), les DG de CHU sont nommés par décret du Président de la République après avis des ministres de l’Enseignement supérieur et de la recherche et de la Santé. La fonction de DG de CHU a été incontestablement valorisée en quelques décennies, la faisant entrer dans la haute fonction publique, avec toutes les conséquences induites : reconnaissance tant que la confiance existe mais éviction lorsque la défiance s’installe…
Comment décririez-vous l’évolution des profils des DG de CHU ?
La première génération de DG était constituée de bâtisseurs car en 1958, il fallait faire « sortir de terre » les CHU. Les collègues de ma génération gardent en mémoire quelques grands noms de DG bâtisseurs qui furent nos maîtres, comme Maurice Rochaix à Bordeaux et Lyon, Roger Méau à Toulouse ou encore Georges Alix à Poitiers où vont se dérouler en décembre les prochaines assises HU. Leur souvenir a imprégné notre action. L’époque est alors celle des 30 glorieuses : la sécurité sociale est en excédent grâce au plein emploi, l’argent n’est pas un problème et les CHU connaissent vite une forte croissance. Mais après la première crise économique à la fin des années 1970, avec des déficits qui s’accumulent, dont celui de l’Assurance maladie, il va être décidé de revoir complètement le système de financement des établissements hospitaliers. On passe alors d’un financement à la journée d’hospitalisation à un régime d’enveloppe annuelle de ressources à ne pas dépasser, ce qui revient à brider l’activité et les investissements. Le DG gestionnaire prend alors le pas sur le DG bâtisseur ; on ne cherche plus à développer l’activité mais à maîtriser la dépense, ce qui n’est pas très exaltant. Cela a duré 20 ans, jusqu’au début des années 2000 où l’on assiste à un changement de paradigme dont les CHU sont largement responsables. Lors des assises des hôpitaux universitaires en 2003 à Nice, les trois conférences des DG, Présidents de CME et Doyens ont présenté à Jean-François Mattéï, ministre de la Santé, un protocole d’accord demandant une relance de l’investissement, une nouvelle organisation de la gouvernance et un financement à l’activité, ce que nous avons obtenu progressivement. Le DG est devenu stratège avec l’objectif de faire gagner à son CHU des parts de marché sur la concurrence. La tarification à l’activité a fait entrer les hôpitaux dans l’ère du management.
La première génération de DG était constituée de bâtisseurs car en 1958, il fallait faire « sortir de terre » les CHU. Les collègues de ma génération gardent en mémoire quelques grands noms de DG bâtisseurs qui furent nos maîtres, comme Maurice Rochaix à Bordeaux et Lyon, Roger Méau à Toulouse ou encore Georges Alix à Poitiers où vont se dérouler en décembre les prochaines assises HU. Leur souvenir a imprégné notre action. L’époque est alors celle des 30 glorieuses : la sécurité sociale est en excédent grâce au plein emploi, l’argent n’est pas un problème et les CHU connaissent vite une forte croissance. Mais après la première crise économique à la fin des années 1970, avec des déficits qui s’accumulent, dont celui de l’Assurance maladie, il va être décidé de revoir complètement le système de financement des établissements hospitaliers. On passe alors d’un financement à la journée d’hospitalisation à un régime d’enveloppe annuelle de ressources à ne pas dépasser, ce qui revient à brider l’activité et les investissements. Le DG gestionnaire prend alors le pas sur le DG bâtisseur ; on ne cherche plus à développer l’activité mais à maîtriser la dépense, ce qui n’est pas très exaltant. Cela a duré 20 ans, jusqu’au début des années 2000 où l’on assiste à un changement de paradigme dont les CHU sont largement responsables. Lors des assises des hôpitaux universitaires en 2003 à Nice, les trois conférences des DG, Présidents de CME et Doyens ont présenté à Jean-François Mattéï, ministre de la Santé, un protocole d’accord demandant une relance de l’investissement, une nouvelle organisation de la gouvernance et un financement à l’activité, ce que nous avons obtenu progressivement. Le DG est devenu stratège avec l’objectif de faire gagner à son CHU des parts de marché sur la concurrence. La tarification à l’activité a fait entrer les hôpitaux dans l’ère du management.
Quand et comment les femmes ont-elles pris le pouvoir ?
La féminisation de la fonction de DG est assez récente. Lorsque j’ai commencé ma carrière de DG de CHU en 1992, la conférence des DG comptait une seule femme : Annie Ramin, DG du CHU de Fort de France à la Martinique. Les choses ont bien évolué depuis. Les femmes sont entrées en grand nombre dans les facultés de médecine et à l’Ecole des hautes études en santé publique (EHESP), qui a succédé à l’ENSP. Et ce mouvement s’est accompagné de la volonté politique de promouvoir les femmes aux plus hautes fonctions de direction des établissements hospitaliers.
La féminisation de la fonction de DG est assez récente. Lorsque j’ai commencé ma carrière de DG de CHU en 1992, la conférence des DG comptait une seule femme : Annie Ramin, DG du CHU de Fort de France à la Martinique. Les choses ont bien évolué depuis. Les femmes sont entrées en grand nombre dans les facultés de médecine et à l’Ecole des hautes études en santé publique (EHESP), qui a succédé à l’ENSP. Et ce mouvement s’est accompagné de la volonté politique de promouvoir les femmes aux plus hautes fonctions de direction des établissements hospitaliers.
Quels conseils donneriez-vous à un postulant à la fonction de DG de CHU ?Il faut au préalable avoir fait ses preuves comme chef d’établissement d’un centre hospitalier général. Ensuite, il est important d’enrichir sa culture, de connaître l’histoire hospitalière en général, et tout particulièrement celle de la ville et du CHU auquel on postule. Ces éléments peuvent faire la différence lors des auditions.
1 – Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires
Propos recueillis par Hélène Delmotte
Propos recueillis par Hélène Delmotte