Depuis 2006, Sylvain Groud, éprouve les limites du corps dansant en allant à la rencontre du corps à l’hôpital, du corps empêché par les actes médicaux. Nourri du dialogue entre soignants, soignés et artistes, il entre en résidence au CHU de Rouen et dans les établissements hospitaliers pour personnes âgées dépendantes de la région Haute-Normandie. Dans ces maisons de retraite, deux danseurs et un vidéaste s’immergent durant une semaine au sein des services et proposent des ateliers aux patients et personnels et des temps dansés dans les chambres. A l’issue de leur performance, une restitution par le son, l’image et le mouvement est proposée. De ces visuels émane une nouvelle perception du corps, du mouvement et des espaces. Retour sur un engagement d’exception. |
Pourquoi cet engagement dans les hôpitaux ?
Sylvain Groud Je suis persuadé que l’artiste que je suis a eu la chance de vivre des évènements de vie bouleversants qui ont conduit l’homme que j’étais à l’hôpital. Ces étapes m’ont mis face à des évidences. Pour toute personne qu’elle soit soignée, soignante, visiteuse l’hôpital est un lieu où se joue la complexité des relations humaines poussées au paroxysme, ce qui représente tout le matériau de mes créations chorégraphiques.
J’ai reconnu un territoire, et les humains qui y vivent, s’y organisent et y meurent aussi. Mesurons nous vraiment la vérité essentielle qui s’y joue chaque instant. Pour chacun de ses acteurs.
Selon vous comment les personnes hospitalisées ou résidentes reçoivent les mouvements de ces danseurs au corps jeune et sain ?
Sylvain Groud Lors de chaque intervention j’essaie avant tout de lutter contre cette première impression – tout à fait normale au demeurant. Bien plus primordiale que l’aspect physique du danseur, ce qui me préoccupe au plus haut point c’est la rencontre qu’il provoque.
Lorsque je danse, lorsque j’agence les mouvements entre eux, je propose, je fouille, je cherche à comprendre le monde, je désire le contacter. Je fabrique un instant, je tente l’ouverture. Mon expérience au sein des unités de soin me fait dire que les patients reçoivent nos propositions avant tout comme autant d’invitations à apprécier et à partager la qualité de cet instant. Celui-ci permet d’échapper un temps à sa condition de malade ou de soignant, de se sentir en vie.
Définissez-vous votre intervention comme un complément du soin ? Comme un soin ?
Sylvain Groud A mon sens, l’artiste (et je ne parle là que de l’artiste) ne peut intervenir à l’hôpital que dans une totale liberté d’expression. Il s’agit d’être conscient de la situation mais libre ! Si l’artiste agit dans un but prédéfini avec un cahier des charges précis, cette intervention est alors d’une autre nature.(art-thérapie, ergothérapie, ect)
En état de performance dans une salle d’attente, un couloir, une chambre, je tente de lâcher prise et me relie à l’autre. Je m’y sens un filtre, un transmetteur. Mon simple objectif, recevoir et traduire son émotion pour appréhender la mienne, malaxer la sensibilité qui y règne, reconnaître et incarner les états de corps.
Une oeuvre, une proposition artistique, parce qu’elle entre en chacun de nous, nous provoque un bouleversement plus ou moins marqué, plus ou moins conscient.
Et si un jour, il vous arrivait d’être hospitalisé ou hébergé en maison de retraite médicalisée, quel environnement aimeriez-vous trouver ?
Sylvain Groud J’aimerais avant tout que ce lieu me permette de rester une personne, avec ses aspirations, son passé. J’aimerais qu’il me permette de continuer à rencontrer des hommes et des femmes qui continuent à apprendre, à jouer, à être.
La compagnie Sylvain Groud bénéficie de l’appui de la mission « culture à l’hôpital » du CHU de Rouen
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Armelle Guével
Administratrice
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