Après son examen à l’Assemblée nationale, le Projet de la Loi de Financement de La Sécurité Sociale (PLFSS) 2025 s’est retrouvé la semaine dernière dans les mains des sénateurs. Il n’a alors pas fallu longtemps pour que la Conférence des Directeurs Généraux de CHRU de France publie un communiqué de presse. « Des informations récentes renforcent les CHU dans leur crainte d’une double crise qui apparaît inéluctable si le redressement des comptes du régime de retraite des collectivités locales et de la fonction publique hospitalière, gérés par la CNRACL, devait de facto être absorbé par les hôpitaux publics et peser gravement sur leurs besoins de financement des prochaines années. », peut-on lire en en préambule du document.
Plus d’un milliard de déficit en 2024
La Conférence rappelle que l’examen du PLFSS intervient dans une période très difficile sur le plan financier pour les CHU qui voient leur déficit doubler chaque année depuis quatre ans, s’établissant à 800 millions d’euros en 2023. En 2024, ce chiffre pourrait atteindre 1,1 milliard d’euros. Une dégradation rapide et plus qu’alarmante, imputable « à la baisse d’activité consécutive à la période Covid « , et « surtout » au poids de « nouvelles charges structurelles liées à l’inflation et aux revalorisations salariales qui se sont succédées depuis 2021 et dont les CHU sont très loin d’avoir été compensés intégralement. » Non sans conséquences.
Car cette dégradation spectaculaire de la situation financière des CHU, qui s’est accélérée beaucoup plus rapidement que pour le reste des établissements hospitaliers non universitaires, menace « directement leur capacité de financement et l’état de leurs dettes « . Aujourd’hui, plus de la moitié d’entre eux (18 sur 32) « se retrouvent en insuffisance nette de financement et devront de nouveau emprunter en urgence pour parvenir à rembourser le capital de leurs dettes. » S’endetter pour payer de la dette. Autre information inquiétante apportée dans ce communiqué : pour 16 CHU, « la durée apparente de la dette atteinte une moyenne de 14,9 années, dépassant largement le ratio réglementaire de moins de 10 ans. »
Vers une crise de l’hôpital encore jamais vue
Annoncée par le gouvernement il y a plusieurs semaines dans le but de renflouer les caisses de la CNRACL, l’augmentation de 4 points du taux des cotisations de retraite pour les fonctionnaires territoriaux et hospitaliers, soit 2,3 milliards d’euros à la charge de leurs employeurs fait donc frémir les intéressés. Pour ce qui est des CHU, ses représentants voient dans cette augmentation la perspective néfaste d’une « crise inédite de l’hôpital public « avec deux risques majeurs à court terme.
Le premier serait de voir des CHU rapidement asphyxiés et incapables d’investir pour l’avenir et dans leurs territoires. « La Conférence anticipe dès à présent un risque de retard des délais de paiement aux fournisseurs avec un impact négatif sur le tissu économique des territoires, des ruptures de trésorerie dès 2025 dans plusieurs établissements, etc. De nombreuses opérations structurantes retenues dans le cadre du Ségur investissement devront être, dans le meilleur des cas différées, voire dans certains cas abandonnées, alors même qu’il s’agit d’opérations de modernisation majeures, attendues de longue date par les équipes médico-soignantes et par les territoires, et qui conditionnent le projet stratégique de nombreux CHU. »
Le deuxième volet de cette double crise serait, toujours selon la Conférence des DG de CHU, une crise de l’offre de soin pour les Français. » Dans un contexte de tension extrême sur les finances, les gains de productivité risquent forts de devenir la seule variable d’ajustement possible pour les directeurs d’établissement qui feront au mieux pour préserver les projets d’investissement. Cette course à la performance a pourtant montré toutes ses limites par le passé : perte de sens des hospitaliers, crise d’attractivité et de recrutement dans l’hôpital public mise en lumière au moment de la crise sanitaire, contraction du nombre de lits ouverts, etc. »
Le message est donc clair. Si l’offre de soin des CHU devait être menacée, c’est l’ensemble de l’accès aux soins qui en pâtirait, et donc la santé des Français.
Enrayer la spirale financière
En conclusion, le dernier communiqué de la Conférence des Directeurs généraux de CHU assure qu’il est « essentiel que le PLFSS prévoit les moyens nécessaires pour enrayer la spirale financière dans laquelle les établissements publics de santé, et tout particulièrement les CHU, sont entrainés. Cela passe par un niveau d’Objectif National des Dépenses d’Assurance Maladie (ONDAM) qui ne soit pas amputé par l’impact de la situation de la CNRACL mais aussi par une remise à niveau des financements tenant compte de l’évolution structurelle des charges. »
La rédaction