Des craintes qui se sont confirmées. Le 2 octobre dernier la Conférence des Directeurs généraux de CHU, par la voix de son nouveau président Philippe El Saïr, ne cachait pas son pessimisme sur la réalité financière des 32 CHU Français, dévoilant le chiffre de 402 millions d’euros de déficit en 2022. L’inquiétude était alors de voir cette situation se dégrader fortement. Quatre mois plus tard, un nouveau communiqué, rédigé conjointement par les trois instances représentatives des CHU, indique que le déficit a été multiplié par trois en un an, s’établissant à 1,2 milliards d’euros.
Selon les trois Conférences, qui n’ont pas peur d’employer le mot « catastrophique » pour qualifier le dernier atterrissage budgétaire, cette chute « profonde et rapide » de la capacité des CHU à s’autofinancer (- 86%) vient « mettre en péril l’embellie constatée sur le plan de l’attractivité et de la fidélisation des personnels soignants [sujet au coeur des dernières Assises Hospitalo-universitaires] ou encore la baisse de l’absentéisme. » Ces difficultés, « peut-être les plus graves depuis la création des CHU en 1958″, nécessitent des « mesures d’urgences« .
Des facteurs extérieures
Comment en est-on arrivés là ? La dégradation « est liée à plusieurs facteurs externes », dont une explosion des dépenses en raison de l’inflation (avec un reste à charge pour les CHU à hauteur de 585 millions d’euros en 2023), un manque de financement de mesures du Ségur de la santé, et une baisse des recettes dues aux fermetures de lits dans la période qui a suivi la crise du Covid, expliquent les trois présidents.
Autre rappel fait pour les trois Conférences CHU dans ce communiqué, celle de la triple mission des CHU, axée autour du soin, de la recherche, et de l’enseignement (on pourrait y ajouter la prévention), ne saurait fonctionner sans des « finances saines et solides. » Conséquences de cette situation financière dégradée : l’ « allongement des délais de paiement des fournisseurs et une fragilisation profonde des opérations d’investissement Ségur, dans un moment où le recours à l’emprunt est plus difficile et plus coûteux. »
Une intervention financière de l’Etat indispensable
Les CHU estiment aussi que l’Etat doit intervenir rapidement en mettant en place « une stratégie de financement à long terme pour continuer à investir, innover et éviter ainsi les conséquences très négatives sur les territoires desservies par les CHU. » Il serait « choquant » que ces derniers, « bouclier sanitaire du pays pendant la crise du Covid, sortent extrêmement fragilisés de celle-ci.« , poursuivent ceux qui, bien conscients de la crise qui traverse le modèle hospitalo-universitaire, pensent néanmoins qu’il est encore possible d’éviter le pire à court terme.
A l’heure où l’on ne sait pas quelle place occupera l’hôpital et, plus largement, la santé dans le discours de politique générale du Premier ministre Gabriel Attal, nulle doute que sa ministre en charge de la santé et de la prévention, Catherine Vautrin, soit particulièrement informée du gouffre financier qui menace actuellement les CHU. Son directeur de cabinet adjoint, Yann Bubien, était, il y a quelques jours encore, Directeur général du CHU de Bordeaux.
La rédaction