Il y a 17 ans, la 1ère implantation d'une valve aortique percutanée était réalisée au CHU de Rouen par le Pr Alain Cribier. Une innovation technologique qui a ouvert un champ nouveau en cardiologie, offrant une alternative à une opération lourde avec une ouverture du thorax. Plus de 250 000 patients atteints de sténose aortique sévère à haut risque de mortalité chirurgicale ont bénéficié de cette technique dans le monde, alors que de récents travaux montrent également son intérêt chez les patients à faible risque.
Il y a 17 ans, la 1ère implantation d’une valve aortique percutanée était réalisée au CHU de Rouen par le Pr Alain Cribier. Une innovation technologique qui a ouvert un champ nouveau en cardiologie, offrant une alternative à une opération lourde avec une ouverture du thorax. Plus de 250 000 patients atteints de sténose aortique sévère à haut risque de mortalité chirurgicale ont bénéficié de cette technique dans le monde, alors que de récents travaux montrent également son intérêt chez les patients à faible risque.
L’histoire commence en 1985. Face au nombre important de patients ne pouvant relever de la chirurgie cardiaque, l’équipe du Pr Cribier, du service de cardiologie du CHU de Rouen, développe une première technique alternative : la dilatation valvulaire aortique par ballonnet. Ce procédé technique, rapidement appliqué à travers le monde, reste malheureusement associé à un fort taux de récidive (80% à un an). Pour le Pr Alain Cribier et son équipe, la seule solution possible semble alors de compléter la dilatation par la mise en place d’une valve artificielle par cathétérisme cardiaque à l’aide d’un stent valvulé.
La mise au point des premières valves artificielles
Afin de valider ce concept de "stent intra-valvulaire aortique dans le cadre d’un rétrécissement aortique calcifié", le Pr Cribier réalise en 1993 une évaluation en post-mortem sur des patients décédés de rétrécissement aortique. "L’implantation d’un stent permettait de maintenir la valve malade ouverte de façon satisfaisante. Il fallait que ce stent ait des dimensions qui permettent, une fois en place, de ne pas obstruer les artères coronaires situées juste au-dessus de la valve aortique, ni de léser la valve mitrale, qui se situe juste en-dessous", explique le spécialiste. Restait ensuite à mettre au point une valve artificielle à l’intérieur du stent pour assurer la fonction valvulaire…
Pendant 5 ans, la recherche d’un financement à travers le monde est un échec. L’opposition des experts mondiaux à cette nouvelle technique est unanime. "C’est le projet le plus stupide jamais proposé me disait-on à l’époque, se souvient Alain Cribier. En 1999, j’ai donc décidé de créer aux côtés de deux ingénieurs et d’un médecin, une start-up aux USA (Percutaneous Valve Technologies, PVT). Cependant, les premiers prototypes de valve ont vu le jour en Israël en 2000. Nous avons pu développer une valve faite de péricarde bovin suturé à l’intérieur d’un stent en acier expansible au moyen d’un ballonnet gonflable. Les premiers tests en laboratoire ont rapidement suivis. Plus de 100 implantations valvulaires ont été ensuite réalisées chez l’animal (brebis) par notre équipe à l’Institut Monsouris avant la première implantation chez l’homme, au CHU de Rouen, le 16 avril 2002".
Le Pr Alain Cribier auprès du premier patient ayant bénéficié du TAVI, le 16 avril 2002
Une 1ère mondiale plébiscitée en Europe et aux Etats-unis
Réalisée sous anesthésie locale en passant par la veine fémorale au pli de l’aine, cette première mondiale a soulevé un enthousiasme considérable dans la communauté médicale et a permis de débuter à Rouen puis aux Etats Unis une série de 40 implantations humaines en situations compassionnelles, chez des patients en phase terminale de la maladie et ayant de multiples maladies associées (études I-REVIVE et RECAST).
Ces études initiales ont été complétées par des études aux USA et en Europe et ont confirmé la faisabilité des implantations et l’amélioration symptomatique rapide qui en découlait. En 2004, la start-up PVT est acquise par la compagnie Edwards Lifesciences (USA), la plus expérimentée au monde dans le développement des bioprothèses. Des progrès technologiques très importants sont réalisés permettant notamment une mise en place beaucoup plus simple de la valve.
"En passant la valve par l’artère fémorale, au pli de l’aine plutôt que par la veine fémorale, notre technique est devenue à la portée de toutes les équipes", précise le Pr Cribier. La voie d’abord artérielle fémorale est aujourd’hui largement privilégiée (> 90%) en raison de son caractère moins invasif, réalisable sous anesthésie locale, permettant une hospitalisation de quelques jours et un retour à domicile dans la grande majorité des cas. Lorsque l’axe ilio-fémoral est inadéquat (trop étroit, trop calcifié ou trop tortueux), plusieurs voies alternatives mini-chirurgicales sont possibles (trans-aortique, trans-carotide, sous-clavière).
"En passant la valve par l’artère fémorale, au pli de l’aine plutôt que par la veine fémorale, notre technique est devenue à la portée de toutes les équipes", précise le Pr Cribier. La voie d’abord artérielle fémorale est aujourd’hui largement privilégiée (> 90%) en raison de son caractère moins invasif, réalisable sous anesthésie locale, permettant une hospitalisation de quelques jours et un retour à domicile dans la grande majorité des cas. Lorsque l’axe ilio-fémoral est inadéquat (trop étroit, trop calcifié ou trop tortueux), plusieurs voies alternatives mini-chirurgicales sont possibles (trans-aortique, trans-carotide, sous-clavière).
Pour les patients, un gain de confort incomparable
Comparé au remplacement valvulaire aortique chirurgical, l’implantation d’une valve aortique percutanée par voie fémorale offre un confort sans aucune mesure pour les patients, "tant sur les plans physiques que psychologiques", souligne le Pr Cribier. Là où le traitement chirurgical nécessite une opération lourde avec une ouverture du thorax au niveau du sternum et une circulation extracorporelle permettant d’arrêter le coeur durant l’intervention, le remplacement de la valve aortique réalisé par voie percutanée est réalisé sous anesthésie locale, avec une simple ponction au pli de l’aine. Les patients peuvent sortir de l’hôpital à partir du lendemain et rentrer chez eux, sans avoir recours à de la rééducation fonctionnelle.
Les avancées se poursuivent
Les résultats du TAVI sont tirés de larges études randomisées internationales (PARTNER et Corevalve Trial) publiées dans les plus grandes revues médicales, en particulier le New England Journal of Medicine. Ces études ont démontré:
• La grande supériorité du TAVI par rapport au traitement médical chez les patients inopérables;
• L’équivalence des résultats du TAVI chez les patients à haut risque chirurgical ou à risque intermédiaire et même la supériorité du TAVI lorsque la voie fémorale est utilisée;
• Et surtout, début 2019, l’équivalence et même la supériorité du TAVI chez les patients "tout venant" âgés de plus de 65 ans porteurs d’un rétrécissement aortique calcifié serré symptomatique (valvesbicuspides exclues).
Les résultats des études récentes ouvrent la voie d’une extension des indications du TAVI aux patients à moindre risque, en particulier chez ceux de plus de 75 ans. Dans un avenir proche, le TAVI pourrait devenir le traitement de choix du rétrécissement aortique serré chez les patients symptomatiques de plus de 65 ans et la chirurgie serait réservé aux patients présentant une contre-indication au TAVI.
Et si on stoppait le rétrécissement aortique ?
Les travaux de l’équipe rouennaise continuent 17 ans après la première implantation valvulaire aortique chez l’homme. Dans le but de mieux comprendre le rétrécissement aortique et d’améliorer sa prise en charge, le Pr Hélène Eltchaninoff, s’appuyant sur un consortium de 16 partenaires, a répondu à l’appel à projet en Recherche Hospitalo-Universitaire (RHU) du programme Investissements d’Avenir dont l’opérateur est l’Agence Nationale de la Recherche (ANR). Ainsi a vu le jour le projet STOP-AS (Search Treatment and improve Outcome of Patients with Aortic Stenosis ou Stopper le rétrécissement aortique et ses conséquences) qui se place dans la continuité des travaux pionniers menés à Rouen par l’équipe de cardiologie du CHU autour du TAVI.
Une des missions de STOP-AS est la sensibilisation du grand public au rétrécissement aortique, répandu et grave, mais peu connu. Dans ce contexte, le service de cardiologie du CHU de Rouen organise annuellement la "Journée Souffle au coeur". Cette journée de sensibilisation et de dépistage propose au grand public un stand d’auscultation gratuite par des cardiologues du service. Des stands d’information, animés par des médecins et du personnel paramédical, sont également mis à disposition pour sensibiliser aux maladies des valves et à leur traitement.
Quelques dates clés et chiffres…
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