Phénomène de mode pour les uns, risque d’addiction pour les autres, peu d’études ont été menées sur les adolescents qui pratiquent le sport de manière intensive et encore moins sur l’expérience qu’ils ont de la douleur. Au CHU de Saint-Etienne, une équipe de recherche se penche sur le sujet, coordonnée par le Dr Roger Oullion, Médecin du Sport, responsable de l’Antenne Médicale de Prévention du Dopage et Chercheur associé au Laboratoire de Physiologie de l’Exercice (LPE-UJM), et Thomas Bujon, Maître de Conférence en Sociologie au sein du Laboratoire Triangle (Université Jean-Monnet).
L’adolescent sportif doit apprendre à vivre avec la douleur dans un contexte où le dépassement de soi, de ses limites, sont très souvent présentés comme des conditions de la réussite. Comment ces jeunes vivent-ils les entraînements intensifs, comment expérimentent-ils la douleur physique et morale ? Comment la définissent-ils ? L’évaluent-ils ? Sublimée dans le sport, cette douleur est-elle légitime ?
Pour le savoir, les chercheurs étudient le rapport à la douleur des adolescents sportifs inscrits parfois dans des filières d’accès au haut niveau.
L’étude se basera sur une vingtaine d’entretiens semi-directifs avec des acteurs du sport et sur un questionnaire anonyme et auto-administré auprès de jeunes sportifs (300 adolescents majoritairement âgés de 12 à 17 ans) dont l’activité sportive les amène à venir deux fois par an faire un bilan de santé complet dans un service de médecine du sport d’un hôpital public, dans le cadre du suivi de sections sportives scolaires.
Simultanément, le questionnaire sera proposé en-dehors d’un entretien à 300 autres jeunes athlètes, aux profils sociodémographiques similaires, mais fréquentant un autre site hospitalier et une autre antenne médicale (CHU de Nantes), ce qui permettra d’élargir et de renforcer l’étude et d’éliminer un éventuel biais régional.
L’objectif est de comprendre les modes de consommation de ces adolescents pour mettre en place des outils préventifs ciblés et efficaces concernant leur entourage et leur hygiène de vie. Cet accompagnement ne se limite pas à l’expertise des praticiens de la médecine du sport mais relève aussi de la famille, de l’entourage sportif, des généralistes… Tous participent à la gestion parfois négociée de la douleur et à la redéfinition continue des rapports entre le sport et la santé.
La question du dopage
Les chercheurs partent de l’hypothèse que c’est aussi dans le rapport à la douleur, et non seulement dans le rapport à la performance, que pourraient se comprendre les conduites dopantes et le dopage. En effet, les pratiques de dopage et les conduites addictives pourraient trouver leurs origines dans les pratiques de soin et la gestion chronique de la douleur physique et morale ressentie par les athlètes.
L’étude débutée en janvier 2013 se poursuivra jusqu’au 31 décembre 2014