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«Nos priorités: améliorer le bien-être de nos étudiants et affirmer notre responsabilité sociale»: Pr Jean Sibilia, président des Doyens de médecine

L’amélioration de la qualité de vie des étudiants en médecine, la mise en pratique de la Loi santé, la gestion des stages d’internat sur le territoire, l’engagement pour la recherche médicale, la lutte contre les intolérances…Telles sont les priorités inscrites dans l’agenda des doyens de facultés de médecine à l’heure de la rentrée universitaire. Le point avec le Pr Jean Sibilia, leur président, doyen de la faculté de médecine de Strasbourg, en amont de la conférence de presse annoncée ce 26 septembre.
L’amélioration de la qualité de vie des étudiants en médecine, la mise en pratique de la Loi santé, la gestion des stages d’internat sur le territoire, l’engagement pour la recherche médicale, la lutte contre les intolérances…Telles sont les priorités inscrites dans l’agenda des doyens de facultés de médecine à l’heure de la rentrée universitaire. Le point avec le Pr Jean Sibilia, leur président, doyen de la faculté de médecine de Strasbourg, en amont de la conférence de presse annoncée ce 26 septembre.

Le Centre national d’appui à la qualité de vie des étudiants en santé vient d’être mis en place. Comment avez-vous été partie prenante de sa création? 

Nous avons travaillé avec les associations étudiantes en particulier l‘ANMEF et les ministères pour évaluer et prendre en compte les risques psychosociaux des étudiants, ce qui est pour nous une de nos priorités. Nous avons souhaité un grand débat qui nous a permis d’échanger et d’être en phase avec le souhait partagé de faire évoluer les choses. Pour faire face aux événements dramatiques qui sont survenus, nous nous sommes rapprochés pour comprendre et agir ensemble.
Nous avons soutenu avec beaucoup d’engagement le Dr Donata Marra pour l’élaboration du rapport «sur la Qualité de vie des étudiants en santé» remis en avril 2018 à Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé et Frédérique VIDAL, ministre de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Ce rapport propose 15 mesures essentielles parmi lesquelles la mise en place du Centre national d’appui à la qualité de vie des étudiants en santé et la création de commissions «Bien-être» dans chacune des UFR afin de pouvoir traiter les problèmes de souffrance au travail qui peuvent se poser aux étudiants. Ces commissions sont en place dans toutes facultés depuis déjà plus d’un an.
Nous souhaitons maintenant poursuivre sans relâche nos efforts pour permettre à nos étudiants des études et un début de vie professionnelle plus épanouie et plus heureuse.

Que proposez-vous plus concrètement pour faire reculer la souffrance des étudiants en santé?

Il s’agit aujourd’hui d’aller au-delà de la prévention des risques graves pour améliorer le bien-être de nos étudiants. Et pour y parvenir, la réforme des études médicales et les amendements de la loi Santé que nous avons portés sont des avancées importantes avec notamment la disparition de la PACES et des ECN.
Nous nous sommes aussi félicités que la commission interparlementaire ait retenu notre proposition de favoriser la mobilité internationale des étudiants en 1er et 2e cycle. L’idée étant, sur le modèle d’Erasmus, de leur donner l’occasion de se libérer un temps des contraintes de leur cursus français pour vivre des expériences à l’étranger.
Il faut «décongestionner» notre système de formation, lui donner un souffle nouveau et de l’enthousiasme. Les Doyens s’engagent avec beaucoup de conviction pour que nos étudiants en Santé puissent être des soignants épanouis, ce qui est un atout indiscutable pour exercer leur métier.

La Conférence des Doyens s’est prononcée contre la proposition du Sénat obligeant les internes à effectuer des stages dans les territoires denses en pénurie de praticiens. Pourquoi? 

Nous nous sommes vigoureusement opposés à cette mesure pour deux raisons: nous ne croyons pas aux mesures coercitives pour organiser la Santé et celle-ci est de plus contre-productive car illogique sur le plan pédagogique. On ne peut pas envoyer dans des zones «sensibles» de jeunes étudiants sans encadrement et sans formation aboutie. Ce n’est pas raisonnable, ni pour les étudiants concernés ni pour les patients.

Quelles sont vos propositions pour pallier cette pénurie dans les territoires qui en souffrent?

Nous sommes tout à fait conscients des importantes difficultés liées à une offre de soins hétérogènes, parfois très déficientes dans certains territoires. La seule augmentation du nombre de médecins formés par une transformation du système de «sélection» et de régulation ne réglera pas le problème des déserts médicaux.
Il faut continuer à proposer des mesures «incitatives» en les renforçant et en les régulant pour qu’elles soient efficaces car c’est ce que nous demandent légitimement nos concitoyens et nos élus. Nous avons conscience de nos responsabilités, mais nous n’avons pas de «baguette magique» pour tout régler tout de suite. 
Pour améliorer rapidement les choses, il existe aujourd’hui une démarche appelée «Initiatives territoires» qui s’appuie notamment sur le travail dans les GHT avec une répartition de l’offre de formation par l’ARS en coopération avec tous les partenaires: CHU, CH et facultés de médecine. L’objectif est d’avoir une offre de soin et une offre de formation la plus adaptée possible.
En complément, différentes mesures soutenues par l’ARS et l’Université, mais aussi les étudiants, le Conseil de l’Ordre et les collectivités, permettent de faciliter l’accueil et éventuellement l’installation des jeunes médecins dans des territoires «déshérités». Un contingent important d’internes est maintenant formé en stage ambulatoire, hors de l’hôpital notamment pour la médecine générale. Les étudiants sont formés par des MSU qui sont des praticiens libéraux qui s’engagent pour assurer cette formation.
Preuve que l’offre de formation territoriale commence à porter ses fruits, une récente enquête de l’ISNI  montre que ces «Initiatives territoires» sont extrêmement positives. Si elles ne règlent pas totalement la question des «déserts médicaux», elles permettent de nettes améliorations. L’on peut espérer que les mesures de soutien, la régulation et l’ensemble des propositions de la loi Santé, permettent progressivement une optimisation du dispositif. 

Quelles sont aujourd’hui les grandes priorités d’action pour les Doyens?

Nous nous sommes concentrés ces derniers mois sur tous les volets, notamment de formation, de la Loi santé qui vient d’être votée. Nous souhaitons assurer la faisabilité sur le terrain, ce qui nécessite encore des ajustements parfois importants pour que nos universités aient la réelle capacité d’assurer ce qu’on leur demande, c’est-à-dire de sélectionner et de former les meilleurs professionnels de Santé, en renforçant si possible la qualité de formation, sans dépenser démesurément ce que l’Etat ne pourrait pas assumer. Malgré notre engagement sans faille, il y a une forme de gageure dans ce chantier majeur qui va nous occuper ces prochaines années. 
Nous resterons très attentifs à ce que toutes ces évolutions de la formation garantissent bien la diversité attendue de nos étudiants, la qualité et l’équité. 
Il reste pour nous une autre question préoccupante qui est celle d’un manque total de prise en compte du statut HU dans la loi santé. Cela a créé un grand désarroi dans notre communauté et a suscité une vive inquiétude que nous partageons avec les présidents de CME de CHU et les présidents de CH. C’est pourquoi nous prévoyons une concertation à la rentrée sur ce sujet. 
Nous envisageons aussi un plan d’action cet automne pour soutenir la recherche médicale au moment où sera discutée la Loi de programmation de la recherche qui va déterminer les financements pour les 10 ans à venir. Comme nous l’avons évoqué dans notre rapport « Comment sauver la recherche médicale du déclin », la recherche médicale doit figurer comme une priorité nationale sans quoi notre Recherche, qui reste de haut niveau, grâce à l’engagement de tous, va décliner inexorablement.
Enfin, nous souhaitons continuer à marquer notre engagement en termes de responsabilité sociale et notamment dans la lutte contre la précarité et contre les intolérances de tous ordres. Je vous rappelle le communiqué que nous avons diffusé il y a quelques mois contre l’antisémitisme qui a bien affirmé notre engagement. Nous voulons nous mobiliser de la même façon pour la prise en compte du handicap et sur les risques environnementaux qui nous préoccupent profondément. 
Propos recueillis par Betty Mamane

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